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Bulletin Numismatique n°222 32 Portrait de Charles X, roi de la Ligue © Gallica.fr CHARLES X, ROI DE LA SAINTE LIGUE Au moment où éclatent les guerres de religion (15621598), Charles de Bourbon (1523-1590) est l’un des plus grands princes du royaume. Par le sang tout d’abord puisqu’il est l’oncle du futur Henri IV (1589-1610) et cousin du duc de Guise, Henri Ier (1550-1588). Par les honneurs et les fonctions ecclésiastiques ensuite : évêque de Nevers dès 1540, il devient cardinal en 1548, puis archevêque de Rouen en 1550 et enfin légat du Pape en Avignon en 1565. Par l’argent enfin, car il est aussi l’abbé commendataire d’une vingtaine d’abbayes qui lui octroient des bénéfices si considérables qu’il devient rapidement l’un des hommes les plus riches d’Europe… Son rôle politique commence quant à lui en 1584 suite à la mort de François de France (1555-1584), duc d’Alençon et dernier frère du roi Henri III (1574-1589). Par le traité secret de Joinville, signé le 31 décembre 1584, les chefs de la Ligue catholique et le roi d’Espagne Philippe II (1556-1598) s’accordent pour désigner Charles de Bourbon « premier prince de sang et héritier présomptif du trône ». Sous la pression des ligueurs, Henri III finit par le reconnaître comme « son plus proche parent » et héritier le 17 août 1588. Cependant, Henri III fait arrêter Charles de Bourbon dès le 23 décembre suivant et le fait emprisonner à Amboise, puis Chinon. Après l’assassinat d’Henri III survenu le 2 août 1589, les ligueurs proclament Charles, cardinal de Bourbon, seul roi de France légitime. Les ligueurs multiplient alors les tentatives pour libérer leur souverain. Malgré la captivité du cardinal, ce choix est ratifié par le Parlement de Paris le 21 novembre 1589. Désormais, le Parlement le désigne dans ses actes sous le nom de Charles X, roi de France. Chinon étant trop proche des armées de la Ligue, Henri IV ordonne le transfert de Charles X à Fontenay-le-Comte le 3 septembre 1589. Le roi de la Ligue meurt dans sa prison fontenaisienne quelques mois plus tard, le 9 mai 1590. UN MONNAYAGE À SON NOM Quart d’écu de Charles X, frappé à Nantes en 1590 © Suffren numismatique ; coll. part. Une fois « sacré » par le Parlement de Paris, Charles X adresse le 15 décembre 1589 des lettres patentes prescrivant que les monnaies frappées à partir du 1er janvier suivant porteraient désormais son nom et sa titulature : CAROLVS D G FRANC REX (Charles X par la Grâce de Dieu, Roi des Français). Ces lettres avaient en réalité été rédigées par Charles II de Lorraine (1554-1611), duc de Mayenne et lieutenant-général du royaume1. Bien entendu, seuls les ateliers monétaires installés dans les cités tenues par la Ligue ont suivi les prescriptions du duc de Mayenne. On en compte tout de même une quinzaine et non des moindres : Aix-en-Provence, Amiens, Arles, Bourges, Dijon, Dinan, Laon, Le Puy, Lyon, Marseille, Nantes, Paris, Riom, Rouen et Troyes. Les partisans d’Henri IV ont tout fait pour ralentir la mise en œuvre de cette décision, à la portée ô combien symbolique. Pour être ratifiées à Nantes, ces lettres patentes ont dû attendre l’installation du Parlement de Bretagne ligueur, créé de toutes pièces par Philippe-Emmanuel de Lorraine (1558-1602), duc de Mercœur et de Penthièvre, gouverneur de la province et chef de la Ligue. Cette ratification intervient… en septembre 15902 ! Neuf mois après que la décision ait été prise, mais surtout quatre mois après la mort du monarque. Qu’importe, les pièces frappées à Nantes doivent porter le nom du roi Charles. Qui mentionner d’autre d’ailleurs, puisqu’après la mort du cardinal-roi, les chefs de la Ligue ne parviennent pas à se mettre d’accord pour lui désigner un successeur… 1 Duplessy Jean, Les monnaies françaises royales, tome II « François Ier - Louis XVI », Paris – Maastricht, 1989, 352 p. Voir p. 146 2 BORDEAUX Paul, « Les ateliers monétaires de Nantes, de Rennes, de Dinan et de Saint-Malo pendant la Ligue », 1re partie « Nantes », Revue Numismatique, 4e série, tome 18e, 1914, p. 342-376. Voir p. 345. LA PREMIÈRE MONNAIE NANTAISE POUR LA SAINTE LIGUE (1590)

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