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Bulletin Numismatique n°219 36 Fécamp, juillet 1818, un aubergiste nommé William Morgan est arrêté : il a en sa possession 23 faux billets de 1 Pound datés de 1817. C'est à cette période que les anglais peuplent l'Australie en y envoyant des condamnés à de lourdes peines, 14 ans minimum pour les détenteurs de fausse monnaie. Ces prisonniers sont référencés sur un site très complet. On y retrouve un William Morgan déporté sur le navire Recovery le 30 juillet 1819. Il est possible que ce soit notre homme ! (https:// convictrecords.com.au/convicts/morgan/william/63780) Le dossier que nous présentons ici, et qui sera proposé à la vente dans l'Internet Auction du 24 mai prochain, est exceptionnel. Les documents en anglais et en français listent les 23 billets retrouvés ainsi que le rapport des inspecteurs envoyés par Londres : John Wood Deane (répertorié comme caissier en 1848) et George Carey, rapport validé par Lord Christopher Smith, maire de Londres, un courrier signé de l'ambassadeur de France en Angleterre René Eustache d'Osmond prévenant le garde des Sceaux de leur venue, accompagne l'ensemble. Sur la double page authentifiée par différents sceaux, la signature de Christopher Smith est validée par le notaire John Withers, elle-même validée par le consul général de France, elle-même validée par le ministre des Affaires étrangères ! Ces 23 billets de 1 Pound sont remarquables de qualité : le papier, la gravure, la numérotation, la variété des numéros, des dates et des signatures ne sont pas le fruit d'un vulgaire faussaire. Les billets anglais de cette période sont très rares -les faux aussi. Un ensemble de ce type avec une telle variété est étonnant et ne peut avoir été réalisé que grâce à une technique et une organisation très élaborées. Qu'un simple aubergiste de Fécamp soit en possession de ces 23 billets pose des questions. Était-il le faussaire ? Peu probable. Savait-il que les billets étaient faux ? Rien n'est indiqué. Ces billets faisaient-ils partie d'un ensemble plus important ? Certainement, une qualité et une variété pareilles nécessitaient un gros investissement de départ et impliquaient de gros risques. Napoléon faussaire. Dans le Bulletin de la Société d'Études pour l'Histoire du Papier-Monnaie de 1952 (N°7), le président de la S.E.H.P.M., Jean Michel, détaille dans un long article les espoirs de Napoléon de déstabiliser l'Autriche avec des faux billets, mais aussi, par la suite, l'Angleterre puis la Russie. Les faux autrichiens et russes sont connus, mais pour l'Angleterre le projet n'a pas totalement abouti : En 1809 après Wagram et la Paix de Vienne, la fabrication de faux autrichiens n'est plus nécessaire, mais l'atelier est opérationnel. C'est alors que le général Samson recommande un certain Monsieur Lale pour y réaliser les faux anglais, Savary -duc de Rovigo- lui assure un statut d'impunité et un accès à l'atelier de fabrication situé Boulevard du Montparnasse. La fabrication est lancée, et, détail important pour nos 23 faux Pound portant de nombreuses signatures différentes, Jean Michel explique que les signatures étaient apposées par les deux nièces du Baron Fain, qu'elles excellaient dans ce travail et parvenaient à réaliser plus de mille billets par jour ! Trois agents : Bernard, Blanc et Malchus, furent chargés de répandre les faux en Angleterre mais la banque avait des procédés de vérifications très élaborés et les agents furent rapidement démasqués. Malchus fut pendu, Blanc et Bernard parvinrent à rentrer en France, le premier, conscient des risques se retira mais le second décida de tenter sa chance dans les milieux louches de Hambourg. Il négocie alors avec un certain Joseph Castel, qui armait des corsaires contre les Anglais, pour cinq mille livres (pounds), malheureusement pour lui la Banque d'Angleterre détecte rapidement les faux, et porte plainte contre Castel. Le Maréchal Davout qui n'était pas dans la confidence fait arrêter Bernard et Castel, c'est la fin des faux anglais de Napoléon. Mais nous sommes vers 1812 et nos billets sont de 1817, à moins que les faux Napoléon n'aient été prévus pour une émission future, il est peu probable que William Morgan en ait eu en sa possession, sauf si les participants à cette opération ont poursuivi le travail pour leurs intérêts personnels ? Alors notre aubergiste de Fécamp détenait-il des faux imprimés Boulevard Montparnasse avec le matériel de Napléon ? Difficile à vérifier, mais peut-être que cet article mettra à jour des informations nouvelles ! Détais des 23 billets. Huit signatures différentes, huit dates différentes. Pour chaque date, des plages de numérotation logiques, avec plusieurs signatures pour une même date. La numérotation est variée, tous les chiffres de 0 à 9 sont utilisés. Sur certains exemplaires les traits ondulés caractéristiques du papier de la Banque d'Angleterre sont bien visibles. Tous les billets sont notés « Forged » manuscrit avec les deux signatures de John Wood Deane et George Carey. L'ensemble est proposé dans son intégralité, les 23 billets et les feuillets. DOSSIER FAUX BILLETS ANGLAIS : WILLIAM MORGAN 1818

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