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Bulletin Numismatique n°198 28 en faible quantité, à l’extrême fin du règne, et qu’elle n’a abso- lument pas circulé dans le royaume 4 . De ce point de vue, mieux valait en effet faire figurer le florin, véritable monnaie internationale au XIII e siècle, et largement imité par la suite, ou éventuellement, mais cette monnaie est moins spectacu- laire, le gros tournois d’argent créé par Saint Louis vers 1266, que Hatier mentionnait dans son texte en 1985. Ecu d’or St Louis (1269-1270) Gros tournois de Saint Louis (après 1266) Parisis d’or Philippe VI, Droit (1329) L’ordonnance de 1263 de Saint Louis est également citée dans le texte du Hachette, qui propose en outre une belle monnaie capétienne, le parisis d’or de 1329, représentant le roi en majesté, assis sur un trône gothique à pinacles. La lé- gende est décryptée autour. Magnard présente également, en plus de l’écu de Saint Louis, une monnaie au type du roi en majesté, le double d’or de 1340, mais la légende est fautive (parisis d’or !). Là encore, la comparaison avec les ouvrages d’il y a vingt ans est édifiante : les illustrations étaient souvent les mêmes (flo- rin, ducat, écu de Saint Louis, masse de Philippe le Bel dans 4  Aucun texte français ne le mentionne, si ce n’est un livre de changeur toulousain sous le règne de Philippe le Bel. le Belin qui valait pédagogiquement le parisis d’or ou le double), mais l’étude des phénomènes économiques et moné- taires était beaucoup plus développée. Par exemple, Hatier parlait de la création de grosses pièces d’argent à partir du XIII e siècle pour faciliter les échanges que l’existence des seuls deniers rendait très difficile. Nathan mentionnait les difficul- tés de Philippe le Bel et l’affaiblissement de ses monnaies sous son règne. Belin en faisait de même pour la période de la guerre de Cent Ans, en insistant sur l’altération des monnaies et leurs fréquentes variations de cours 5 . Hachette réalisait une petite synthèse en parlant brièvement de la « mauvaise quali- té » des monnaies de Philippe le Bel (justement liée aux diffi- cultés économiques ; il est heureux que le terme de « faux- monnayeur » ait disparu) et plus loin du « manque de monnaies » à propos de la crise des XIV e -XV e siècles. Les monnaies médiévales ne sont donc pas absentes des ma- nuels scolaires de 5e, mais force est de constater que leur pré- sence a sérieusement régressé en vingt ans. En 1985, nous avions relevé 27 photographies de monnaies (toutes d’or à l’exception des dirhems et du denier à l’effigie de Charle- magne) : 4 byzantines, 5 musulmanes, 18 pour l’Occident médiéval (mais 7 types différents seulement). Le manuel le plus complet était sans doute Belin, qui reproduisait nomis- ma, dinar et dirhem, denier de Charlemagne, florin et ducat, écu de Saint Louis et masse de Philippe le Bel, abordait les phénomènes économiques et monétaires dans le texte et don- nait le texte de l’ordonnance de 1263. Dans les manuels actuels, il n’y a plus que 17 photographies (dont 3 comportent des erreurs soit dans l’orientation des reproductions, soit dans les légendes), et plus aucune byzan- tine. Les textes sont devenus indigents, les monnaies en sont totalement absentes ou réduites à une mention dans une courte phrase. On mesure là, illustrée par ce point particulier, la dramatique évolution qu’ont connu les programmes d’his- toire et de géographie en collège, évolution elle-même liée à la réduction des horaires. Certes, les phénomènes monétaires sont assez abstraits et compliqués à aborder avec des élèves de collège. Mais on peut, en simplifiant intelligemment, leur donner des bases en la matière. Force est de constater que cela ne sera plus le cas, sur ce point d’histoire comme sur d’autres. Et il y a difficilement plus attractif pour un élève de cet âge qu’une monnaie spectaculaire, qui renvoie instinctivement à la notion toujours excitante de trésor et de chasse au trésor, a fortiori quand il est possible de les présenter plus concrète- ment encore en faisant circuler en classe des exemplaires au- thentiques. Nous engageons donc les collègues à ne pas renoncer, à es- sayer, malgré les contraintes horaires toujours plus drastiques, de parler malgré tout des monnaies, avec lesquelles l’historien est à la croisée des évolutions historiques et économiques. J-Ph. CORMIER Lycée de Domfront Auteur de Monnaies médiévales, Reflets des pouvoirs, ed. REMPART- Desclée de Brouwer, Paris, 1996. 5  Avec un exemple faux : il n’y a pas eu 18 mutations dans la seule année 1351, comme il était affirmé dans le texte. IMAGES DES MONNAIES MÉDIÉVALES DANS LES MANUELS SCOLAIRES

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