Bulletin Numismatique n°258 20 Nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer le terme d’anthropomorphe comparé à celui d’androcéphale à propos des monnaies celtiques dans le Bulletin Numismatique, (BN 240, p. 41) : « Un animal est dit anthropomorphe (du grec, ἄνθρωπος / ánthrōpos (« être humain ») et μορφή/ morphḗ (« forme » quand il présente une forme humaine). Dans la mythologie, le Minotaure (mi-taureau, mi-homme), fils de Pasiphaé et d’un taureau, est dit anthropomorphe car il présente un corps humain surmonté d’une tête d’animal (taureau). Dans la mythologie égyptienne, Anubis par exemple est anthropomorphe, homme à tête de chacal qui accompagne l’âme des morts. » Dans l’antiquité gréco-romaine, souvent fleuves et rivières sont représentés sous la forme d’un taureau à tête humaine. À Géla, le protomé de taureau anthropomorphe orne le revers des tétradrachmes entre 480/475 et 415-405 avant J.-C. (HGCS 2/ 338-348 et 350-360). Outre cette dénomination, la plus importante en argent, il se retrouve aussi sur le didrachme dès l’apparition du monnayage au tout début du Ve siècle avant J.-C. Mais il est aussi représenté sur la drachme d’argent, ainsi que le monnayage divisionnaire : hémidrachme (HGCS 2/ 369), trihémiobole (HGCS 2/ 370), obole (HGCS 2/ 372) et litrai, ou 5/6 de la drachme, poids théorique : 0,86 g (HGCS 2/ 373-374). Le protomé anthropomorphe peut être tourné à droite ou à gauche. Il orne aussi de nombreuses monnaies de bronze, soit complet comme sur l’ultime type de tétradrachme avant la destruction de la ville en 405 avant J.-C. (HGCS 2/ 361), soit sous la forme d’un dieu juvénile et cornu (HGCS 2/ 349 pour un très rare tétradrachme) ou d’un dieu barbu. SICILE – GÉLA (Ve SIÈCLE AVANT J.-C.) Géla fut fondée en 688 avant J.-C. par des colons rhodiens et crétois. Le monnayage débuta vers 498 avant J.-C. sous la tyrannie de Kléandros (505-498 AC.) ou d’Hippokratès (498-491 AC.). Gélon (491/490-486/485 AC.), puis Hiéron (486/485-478/477 AC.) furent successivement tyrans de Géla avant de s’imposer à Syracuse. Le dernier tyran fut Polyzalos (478/477-466 AC.) avant le rétablissement de la Démocratie en 466 avant J.-C. comme à Syracuse. La cité connut un développement économique et artistique extraordinaire entre 450 et 413 avant J.-C. L’expédition athénienne, la réaction de Syracuse, modifièrent cette situation. Géla tomba finalement sous les coups des Carthaginois lors de l’invasion de 405 avant J.-C. La cité, détruite, ne devait jamais s’en relever. Néanmoins, la cité resta sous influence carthaginoise avant de passer sous domination de Syracuse et de Denys l’Ancien. Après la mort de Denys, elle rallia Dion contre Denys le Jeune, puis Timoléon restaura la cité avec des colons ioniens de l’île de Keos. Opposée à Agathoklès, Géla fut soumise durement avant de rejoindre l’opposition avec Agrigente avant d’être vaincue et de retomber sous la coupe du monarque syracusain. En 282, Géla fut détruite encore une fois par Phintias et dévastée par les mercenaires Mamertins vers 264 avant J.-C. La cité devint tributaire de Rome au cours des guerres Puniques. Tétradrachme, Sicile, Géla, 430-425 avant J.-C. (Ar, 17,07 g, 26,50 mm, 6 h), étalon attique, poids théorique : 17,28 g, 4 drachmes ou 24 oboles A/ Anépigraphe Bige au pas à droite, conduit par un aurige, tenant les rênes et le kentron, au-dessus, une couronne. R/ ΓΕΛΑΣ (de Géla). Protomé de taureau androcéphale du dieu-fleuve Gélas à droite avec la barbe longue et pointue ; un poisson au-dessous et une branche d’olivier. ANS 78 – GC 796 - MIAMG 4188 – RQEMAC 50 - HGCS 2/ 347 G. K. Jenkins, The Coinage of Gela, Berlin, 1970, n° 394 (A/ 82 – R/ 163) Belle monnaie, centrée des deux côtés. Très jolie représentation du droit, bien venue à la frappe. Revers agréable présentant une fine usure régulière. Patine grise. Très rare. TTB+/ TTB 1 500€/ 2 800€ Mêmes coins que l’exemplaire de la vente Gorny & Mosch Giessener Münzhandlung 196, 7 mars 2011, n° 1146. Nous avons relevé seulement trois exemplaires de ce type dans la base acsearch (Jenkins 394). Ce tétradrachme appartient bien au groupe 6 de Géla qui débute vers 430-425 avant J.-C. Au revers, le taureau androcéphale représente un dieu-fleuve qui pourrait provenir de la métropole de la cité sicilienne, Rhodes, en Carie où le culte du dieu anthropomorphe Archélous est attesté. Néanmoins aujourd’hui, on préfère y voir la représentation du dieu-fleuve Gélas. Au droit, plutôt qu’un quadrige, il faut voir un bige (attelage tiré par deux chevaux) (HGCS 2/ 338-357) alors que sur les dernières émissions, c’est bien un quadrige (attelage de quatre chevaux) qui figure au droit du monnayage (HGCS 2/ 359-361). TÉTRADRACHME DE GÉLA AU DIEU-FLEUVE ANTHROPOMORPHE
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