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Bulletin Numismatique n°256 28 INTRODUCTION Les pièces de 20 francs or au type Marianne Coq ont la réputation d’avoir moins intéressé les faussaires que celles d’autres types (comme Génie ou Napoléon III), à l’exception notable : - des copies Pinay émises en très grand nombre dans les années 50 par l’État lui-même (faux d’État); - des copies contemporaines originaires de pays asiatiques (faux pour tromper). Ces réserves faites, l’existence de Marianne Coq contrefaites (faux d’époque ou faux pour servir) ne fait aucun doute. Elles constituent même un thème de collection prisé de passionnés avertis avec de nombreuses déclinaisons en sous-thèmes parfois surprenants comme ces pièces qui arborent un millésime a priori impossible car postérieur à 1914. Après avoir résumé l’état de nos connaissances à propos de ces contrefaçons anachroniques, nous décrirons plus en détail le cas de deux pièces millésimées 1916 récemment acquises au cours d’une vente aux enchères (voir photo de l’exemplaire n°1 ci-dessous). Photographie de l’exemplaire n°1 du millésime 1916 (©CGB., Paris) UN PEU DE CONTEXTE HISTORIQUE Le contexte historique qui a conduit in fine à l’arrêt définitif de la frappe des Marianne Coq est très particulier et même unique pour ce type monétaire emblématique de la numismatique française. Pour l’appréhender, il faut se replacer juste avant l’entrée en guerre de la France, c’est-à-dire au tout début 1914. À cette époque, comme au début de chaque année depuis 1899, la Banque de France passe commande à l’Administration des Monnaies et Médailles (ancêtre de La Monnaie de Paris) de pièces Marianne Coq à frapper au millésime de l’année en cours. Pour cela, elle lui fait livrer la quantité de lingots nécessaire à l’exécution de la commande. Au début du mois d’août 1914, la réalisation de cette frappe est déjà bien avancée (6.517.782 pièces) lorsque qu’éclate le premier conflit mondial. Cet évènement majeur entraîne la suspension immédiate des frappes. Les lingots qui n’ont pas eu le temps d’être monnayés sont gardés dans les coffres de La Monnaie. Ils y resteront jusqu’en 1921, date à laquelle la Banque de France décide de les monnayer à leur tour (202.359 pièces) afin d’honorer la fin de la commande du millésime 1914 et apurer ainsi les comptes respectifs de la Monnaie de Paris et de la Banque de France comme en témoigne ce document officiel : Extrait du Rapport au ministre des Finances (1919-1923) rédigé par l’Administration des Monnaies et Médailles (1). La Marianne Coq 1914 est de fait le seul millésime de ce type monétaire à avoir été frappé en deux temps : la plus grande partie en 1914, avant la déclaration de la guerre, et le reliquat en 1921. Il n’y a donc jamais eu de refrappe en 1921 comme on le voit souvent écrit dans la presse numismatique mais simplement la conclusion d’une frappe initiée sept années plus tôt. Depuis cette époque, aucune frappe officielle de Marianne Coq n’a été décrétée : il est donc impossible d’observer des pièces authentiques portant un millésime postérieur à 1914. LES FAUX MILLÉSIMES DANS LA PRESSE Et pourtant, la littérature numismatique au sens large (presse, catalogues, sites internet, ventes aux enchères) s’est sporadiquement faite l’écho de la découverte de Marianne Coq ayant un millésime postérieur à 1914. Les publications sont cependant rares et se contentent le plus souvent d’évoquer des contrefaçons d’origine russe, italienne ou libanaise. Malheureusement, aucune preuve documentée ni aucune source vérifiable n’est fournie à l’appui de ces publications. On a de ce fait la désagréable impression d’une légende urbaine toujours d’actualité. Pour tenter d’y voir un peu plus clair, on peut néanmoins avancer qu’il est peu probable que des états étrangers aient eux-mêmes planifié et organisé un tel faux-monnayage (sauf 20 FRANCS MARIANNE COQ : LES MILLÉSIMES IMPOSSIBLES (1915 ET 1916)

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