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Bulletin Numismatique n°256 20 Depuis la Renaissance, le sesterce (sestertius) fut très certainement la dénomination monétaire romaine la plus collectionnée et recherchée de par son aspect, son diamètre, son iconographie entre Auguste et Gallien bien que les « Antiquaires » ou collectionneurs s’intéressent plutôt au monnaies du Haut-Empire pendant les trois premiers siècles entre les Julio-Claudiens et les Sévères. Le sesterce, en orichalque (brillant comme l’or quand il n’est pas patiné) était le plus souvent frappé sur un flan dépassant les 30 millimètres avec une masse de 27,06 g (1/12 L. romaine de 324,72 g ou 24 scrupules ou bien encore 144 siliques poids). Sa valeur, relativement faible, deux dupondii, 4 asses, ne représentait que la vingt-cinquième partie du denarius argenteus (denier) ou le centième du denarius aureus (aureus). Le sesterce (HS) était aussi une unité de compte. Dès le règne de Commode, la masse du sesterce eut tendance à baisser, même si son poids théorique restait intangible. Le phénomène s’accéléra après Alexandre Sévère (222-235). Le sesterce se retrouva taillé au 1/14 L. (23,19 g) jusqu’au 1/18 L. (18,04 g) sous le règne de Trajan Dèce (249-251) qui nous intéresse ici. Pendant ce très court laps de temps entre septembre 249 et juin 251, l’empereur entreprit de grandes réformes afin de restaurer les finances, la cohésion sociale et la confiance. C’est lui qui instaura la première grande persécution contre les Chrétiens qui ne voulaient pas sacrifier au salut de l’Empire et de l’empereur. D’un point de vue monétaire, il restitua la mémoire des empereurs entre Auguste et Alexandre Sévère par une série d’antoniniens (Divo/Consecratio). Surtout, il créa une nouvelle dénomination monétaire, le double sesterce, pièce lourde qui comme l’antoninien et le dupondius avait la particularité de présenter une couronne radiée, signe du doublement de la valeur par rapport à la pièce de base, le sesterce, en l’occurrence. Il fit aussi frapper de rares semis ou demi-as qui n’étaient plus fabriqué depuis plus d’un siècle. brm_568719 (36,34 g, 2500€) Nous connaissons pour Trajan Dèce deux types de revers avec Felicitas et Victoria pour cette nouvelle dénomination qui semble avoir été frappée en assez grande quantité, au regard des exemplaires encore recensés aujourd’hui. Pour le droit, nous avons deux types de bustes, bien entendu radiés, le plus courant avec un buste cuirassé à droite, vu de trois quarts en avant et le second avec un buste drapé et cuirassé à droite, vu de trois quarts en arrière. Associés à l’Auguste, nous avons aussi des doubles sesterces pour son épouse, Herennia Etruscilla, beaucoup plus rares. En revanche, nous ne trouvons ni Herennius Etruscus, ni Hostilien associés à cette dénomination monétaire. Ce dernier élément semblerait placer la fabrication de cette dénomination au début du règne, entre la fin de l’année 249 et le début de l’année 250, sa fabrication s’interrompant avant la nomination d’Herennius Etruscus comme César en mai-juin 250. Ces doubles sesterces s’intègrent dans un système monétaire comme la plus haute dénomination pour le monnayage de bronze. Cependant, dans de nombreux ouvrages, depuis la Renaissance, ils sont considérés comme des « médaillons », ces grands bronzes, souvent très lourds, moyens de propagande, réservés à un cercle restreint de récipiendaires, limités peut-être, à l’entourage impérial, offerts pour des donativa (distribution, ici restreinte) ou des cadeaux à l’occasion de l’année nouvelle ou bien encore des cadeaux diplomatiques. Nous les rencontrons dans l’ouvrage de W. Frœhner, Les médaillons de l’Empire romain depuis le règne d’Auguste jusqu’à Priscus Attalus, Paris, 1878, p. 202-203, mais ils sont absents de l’ouvrage consacré au même sujet sous la plume de F. Gnecchi, I Medaglioni Romani, Milan, 1912. Dans l’ouvrage H. Cohen, encore utilisé, dans le volume V, Description historique des monnaies frappées sous l’Empire romain communément appelées médailles impériales, Paris, 1885, p. 189, n° 39-41 pour le revers Felicitas (estimé 30 francs or) et p. 197, n° 113114 pour le revers Victoria (estimé 30 et 50 francs or). Depuis, les ouvrages consacrés aux médaillons intègrent ou pas les doubles sesterces de Trajan Dèce et de son épouse Etruscille dans leurs colonnes. Abordons maintenant notre exemplaire, en particulier, qui présente un poids exceptionnellement élevé. Pour la vingtaine d’exemplaires que nous avons pu proposer pour Trajan Dèce (20 ex.) ou Étruscille (1 ex.), leur masse pondérale fluctuait entre 27,70 g pour le plus léger jusqu’à 54,63 g pour notre exemplaire le plus lourd, soit le double exactement. Le poids théorique de ce type est de 36,08 g et les poids les plus souvent rencontrés oscillent entre 35 et 45 grammes. Avec notre exemplaire, nous sommes en face d’un véritable « mastodonte » (54,63 g) sur un flan large (39,50 mm) et épais, parfaitement centré des deux côtés avec les grènetis complets et TRAJAN DÈCE DOUBLE SESTERCE OU MÉDAILLON ET POURQUOI PAS LES DEUX !

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