Bulletin Numismatique n°254 34 Nous avons proposé récemment un rarissime solidus de Nicéphore Ier et Stauracius pour l’atelier de Syracuse que nous avons eu l’occasion de décrire dans le Bulletin Numismatique (BN 250, p. 24-25) qui s’est vendu dans la Live Auction de mars 2025, 3 500€ + frais (bby_993520). Nous allons évoquer aujourd’hui un exemplaire de grande qualité, qui sera proposé dans la Live Auction du 23 septembre 2025. Cet exemplaire qui semble stéréotypé est en fait beaucoup plus rare que ne le laissent supposer les ouvrages généraux et frappé à la fin du règne commun de Nicéphore Ier et de Stauracius et nous allons découvrir pourquoi. NICÉPHORE IER DIT LE LOGOTHÈTE (1 NOVEMBRE 802 – 25 JUILLET 811) & STAURACIUS (DÉCEMBRE 803 – 2 OCTOBRE 811) En premier lieu, qui est Nicéphore ? Il est né vers 750 à Séleucie de Pisidie, descendant d’une famille aristocratique. Stratège du thème des Arméniaques sous le règne de Constantin VI (780-796), fils de Léon IV le Khazar et d’Irène, il est écarté du fait de son soutien à Irène. Quand Irène dépose son fils le 19 août 797, Nicéphore revient sur le devant de la scène et devient le logothète du trésor de l’impératrice. Après un règne controversé de cinq ans, Irène est à son tour déposée le 31 octobre 802, exilée à Lesbos où elle meurt l’année suivante. C’est Nicéphore qui monte sur le trône le 1er novembre 802. Son règne est bien connu par les sources, dont Théophane le Confesseur. Nicéphore associe au pouvoir son fils Stauracius dès le mois de décembre 803. Nicéphore est un grand réformateur sur les plans politique, économique, fiscal et religieux. Mais c’est dans le domaine extérieur qu’il se distingue particulièrement. Il doit faire face à un triple danger. Face aux Abbassides du Caliphe Haroun al-Rachid (786809) et de son fils Al-Amin (809-813), la mort du premier et les luttes intestines dans le califat lui permettent de se consacrer aux deux autres adversaires. Contre Charlemagne qui a été couronné empereur le 25 décembre 800 par Léon III (795-816), après avoir espéré une alliance avec Byzance en épousant Irène, après la déposition de la Basilissa, les relations entre les deux empires sont mauvaises. Les régions contestées sont le nord de l’Italie et la Dalmatie. Finalement une trêve est signée entre les deux protagonistes en 810. C’est donc vers le troisième front que se tourne Nicéphore Ier : les Bulgares et leur souverain, Krum Ier (803-814). Le basileus attaque les Bulgares, après des premiers succès livre bataille devant Pliska, la capitale bulgare. Il est vaincu et tué. Son fils Stauracius, lui-même blessé réussit à s’échapper et à regagner Constantinople. Empereur depuis la mort de son père, le 25 juillet 811, il abdique en faveur de son beau-frère, Michel Ier Rhangabe le 2 octobre 811 et meurt trois mois après des suites de ses blessures. Michel Ier, marié à Procopia fille de Nicéphore, associe à son tour, son fils Théophylacte le 25 décembre 811. Son règne sera court, Michel Ier est finalement déposé le 11 juillet 813. Pendant son court règne, Michel Ier reconnaît, Charlemagne comme empereur d’Occident. Les Byzantins sont à nouveau vaincus par Krum ce qui entraîne la déposition de Michel. Solidus, Constantinople, septembre 810 - 26 juillet 811, 5e officine ? E en fin de légende de revers (Or, 4,43 g, Ø, 21,50 mm, 6 h, ± 950 ‰ (taille 1/72L., poids théorique : 4,51 g. 7200 noumia) A/ nICIFO-ROS bASILE’ « Niceforos Basileos », (Nicéphore roi). Buste couronné de face de Nicéphore, vêtu de la chlamyde, tenant de la main droite une croix potencée et la mappa (akakia) de la main gauche ; un globule, devant la croix au-dessus de la main de Nicéphore. R/ StAVRA-CIS dESPOI’E « Stauracius Despoite », (Stauracius despote) Buste couronné de Stauracius de face, vêtu de la chlamyde, tenant un globe crucigère de la main droite et l’akakia (mappa) de la main gauche. BMC/B – Ratto 1784 – Do 2a6 – BN 3 – BC 1604 (900£) – DMBR 2/ 27-1. 3 var. (1800€) - Füeg 2C1 - BCC III/ 178, 1023d Superbe exemplaire sur un flan large et bien centré. Bustes finement détaillés. De légères faiblesses. Patine de collection. Très rare. SUP 1 500€/ 2 500€ Type frappé à la fin du règne en 810-811. Flan large avec les grènetis complets (> 21 mm). Petit buste fin de Stauracius. Globule dans le champ à gauche de la croix au droit. E onciale en fin de légende de revers. Nous avons avec l’ouvrage de Franz Füeg, Corpus of the Nomismata from Anastasius II to John I in Constantinople 713-976. Structure of the Issues. Corpus of Coins Finds. Contribution to the Iconographic and Money History, un outil indispensable pour comprendre, connaître et apprécier la rareté réelle des monnaies d’or. Pour l’ensemble des trois classes des solidi pour Nicéphore et Stauracius, nous avons au total 324 solidi dont seulement 36 exemplaires pour notre type pour deux variantes (E et X en fin de légende de revers) avec 10 coins de droit et 24 coins de revers identifiés contre 35 et 44 coins de droit pour les deux autres classes. C’est de loin, le type le plus rare ! Nous avons encore une fois, si cela était nécessaire, la preuve que les ouvrages sont et restent indispensables afin d’appréhender un monnayage. Nous devons nous attacher à scruter tous les détails d’une monnaie, qui au premier abord pourrait paraître normale ou commune, et est en fait rare, grâce à un détail dans la légende, l’iconographie, les spécificités techniques qui en modifient l’aspect. Prenez le temps de regarder les monnaies. Chacune d’entre elles peut receler un trésor ignoré ! Marie BRILLANT & Laurent SCHMITT NICÉPHORE IER ET STAURACIUS : DU DÉJÀ VU ?
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