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Bulletin Numismatique n°254 26 Avec ce statère sous « slab », nous découvrons une scène religieuse traditionnelle d’interrogation d’oracle. Sur notre exemplaire, avec les légendes en araméen placées derrière le dieu (Ana) et devant le satrape (Datames), nous savons très bien qui sont les personnages et leurs rôles respectifs. Le premier, le personnage vêtu à la grecque (satrape) interrogeant le dieu, Ana imberbe, nu debout donnant sa prédiction tandis que le récipiendaire, nu jusqu’à la ceinture, barbu à la manière des philosophes reçoit le message en signe d’acquiescement ; le tout se déroule dans l’enceinte close d’un temple délimité par le grènetis et une ligne continue avec une vision semi-circulaire entretenue par les antéfixes placés dans le champ supérieur de la pièce. Un brûle-parfum (thymiaterion) sépare les deux personnages, frontière entre le divin et l’humain. Au droit, le Baaltars ou Baal de Tarse, dieu protecteur de la cité et que l’on a déjà rencontré sur le monnayage du satrape Pharnabaze (378/7374/3) sera ensuite repris par le satrape Mazaios qui succède à Datamès (nommé aussi Tarkumuva). C’est ce Baal de Tarse qui aurait servi de modèle pour le tétradrachme d’Alexandre le Grand au Zeus aétophore (porteur d’aigle). Ce type ne serait frappé qu’après la prise de Tarse en 333 avant J.-C., par Alexandre le Grand. La particularité de notre statère repose sur le fait que le Baaltars est accosté de plusieurs symboles, peu visibles sur cet exemplaire, mais de plus ceinturé d’une muraille, représentant les murs de la cité comme cela arrive parfois dans la région. CILICIE – TARSE – SATRAPE DATAMÈS (378-362 AVANT J.-C.) Dès 379 avant J.-C., Pharnabazes, satrape de Bithynie, avait été chargé de reconquérir l’Égypte qui s’était révoltée, sous la conduite de Nectanebo Ier (380-363 AC.), contre la domination perse. Datamès, satrape de Cappadoce, était chargé de le seconder pour le compte d’Artaxerxès II (404359 AC.). Pour préparer cette expédition, des quantités considérables de métal furent monnayées à Tarse. D’abord frappées pour Pharnabazes entre 378 et 374, elles furent ensuite fabriquées pour Datames, qui succède à Pharnabazes en 374 avant J.-C., entre 374 et 372. Après la mort de Pharnabazes, Datames reçut un commandement très important : pratiquement toute l’Asie Mineure. Il ne tarda pas à se révolter contre l’autorité du Grand Roi. Datames mourut en 362 avant J.-C. Statère, Tarse, Cilicie, 365-362 avant J.-C., 5e émission (Ar, 10,35 g, 23 mm, 12 h) étalon persique, poids théorique : 10,56 g, 2 drachmes ou 12 oboles SCÈNE DE PROSKYNÈSE À TARSE ! A/ Légende araméenne (Baal Tarz) Baaltars assis à droite sur un siège sans dossier, tenant un sceptre surmonté d’un aigle de la main droite et un cep de vigne de la main gauche avec un épi de blé ; devant lui, un thymiaterion ; le tout entouré des murailles d’une cité. R/ Légende araméenne (Ana/Tadnmu) Le dieu du ciel Ana, nu debout à gauche, tourné à droite, étendant la main droite vers Datames debout à droite tourné à gauche dans l’attitude de la proskynèse (s’inclinant en plaçant la main devant la bouche) ; entre eux, un thymiaterion ; le tout dans un carré bouleté figurant le naos d’un temple. SNG Aulock 5945 – SNG Levante 83 – SNG France 2/ 291 R. A. Moysey, Staters of Pharnabazos and Datames from Tarsus, MN. 31, p. 7-61, pl. 4/41 et 49 G. Le Rider, La naissance de la monnaie. Pratiques monétaires de l’Orient ancien, p. 207-237, pl. 6, n° 11 Monnaie centrée des deux côtés. Superbe revers, finement détaillé. Droit à l’usure régulière. Patine grise avec des reflets bleutés et dorés. Rare. TTB/ SUP 600€/ 1 200€ Nous sommes en présence d'une scène de consultation d'oracle et de vénération. Datames fait appel à Ana pour lui demander la victoire. Malheureusement, Datames fut assassiné en 362 avant J.-C. et c'est Mazaios qui lui succéda l'année suivante. Pour cette émission, R. Mosey a recensé 136 exemplaires avec 81 coins de droit et 109 coins de revers. Malheureusement le droit ne permet pas d’identifier le coin de droit et une combinaison valide. En revanche, les statères avec le nom du dieu inscrit semblent plus rares. Exemplaire sous coque NGC Ch XF (Strike 4/5, Surface 2/5). Ce type de statère appartient à la dernière partie de la présence satrapale de Datamès à Tarse avant de disparaître et de finir assassiné. Ces satrapes locaux qui détenaient parfois un pouvoir militaire et politique important sur la Cilicie, voire au-delà se comportaient comme de véritables monarques et finissaient parfois par se révolter contre l’autorité du Grand Roi en l’occurrence, Artaxerxès II (404-359 avant J.-C) Le monarque achéménide dut contrecarrer les plans des Grecs, Athéniens et Spartiates entre la fin de la Ligue de Délos et la chute de l’Empire athénien en 404/3 avant J.-C., suivie de la montée de la puissance navale et militaire spartiate dans la région. Un équilibre précaire fut entériné par la paix du Grand Roi (Antalcidas) en 386 avant J.-C. C’est dans ces conditions que plusieurs satrapies se révoltèrent mettant à mal le pouvoir Achéménide au moment où se reconstituait la seconde Thalassocratie Athénienne (377 avant J.-C.). Notre statère est une monnaie essentiellement militaire qui a pour but de stipendier les mercenaires, souvent grecs qui servaient dans les armées du Grand Roi et de ses satrapes. Marie BRILLANT & Laurent SCHMITT

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