Bulletin Numismatique n°253 28 Après la stabilité qu’avaient apportée Héraclius (610641) et ses successeurs Constans II (641-668), son petit-fils, puis Constantin IV (668-685) son fils, la période d’une trentaine d’année qui suit est marquée par une période de crise qui s’achève avec le dernier rejeton de la dynastie Héraclide, Justinien II (1er règne, 685-695, 2e règne 705-711). Entre 695 et 717, sept empereurs détiennent les rênes du pouvoir, parfois pour des périodes très courtes : Léonce (695-698), Tibère III Aspimar (698-705), Justinien II (705-711), Philippius Bardanes (711-713), Anastase II Artemius (713-715), Théodose III (715-717) et enfin Léon III (717-741), fondateur de la dynastie Isaurienne. Pendant ce laps de temps, peu d’entre eux moururent dans leur lit. Souvent mutilés, au moment de leur déposition et envoyés en exil où ils moururent des suites de leurs blessures quand ils n’étaient pas mis à mort ignominieusement comme Léonce ou Tibère en 705 quand Justinien II recouvra le pouvoir ou Anastase II en 721, éliminé pour avoir conspiré contre Léon III. Ces événements mouvementés coïncident avec une recrudescence des périls extérieurs. Les musulmans s’emparent de Carthage et achèvent la conquête totale des territoires contrôlés par les Byzantins jusqu’aux portes de Constantinople, tandis qu’un nouvel adversaire émerge dans les Balkans, les Bulgares avec leur tsar (Tervel 701-718). Les dangers extérieurs se doublent de troubles intérieurs alimentés par la querelle monophysite. PHILIPPICUS BARDANES (4 NOVEMBRE 711 – 3 JUIN 713) Philippicus, d’origine arménienne, se révolta contre le pouvoir arbitraire de Justinien II. La révolte prit naissance à Cherson que Justinien avait punie pour avoir été le lieu de sa détention. Bardanes marcha sur Constantinople et Justinien II et son fils, Tibère, furent mis à mort. Favorable à l’hérésie monophysite, il se trouva privé de nombreux soutiens en Occident, en particulier à Rome. Très vite, Philippicus dut faire face à la double menace des Bulgares avec Tervel, ancien allié de Justinien II lors de sa réinstallation à Constantinople en 705 qui parvint pratiquement sous les murs de la capitale. Finalement, l’empereur fut déposé, aveuglé et envoyé dans un monastère où il mourut rapidement. Solidus, Constantinople, 711-713, 4e officine (Or, 4,48 g, 19 mm, 6 h) (95 à 98 % d’or, taille 1/72 L., poids théorique : 4,51 g, 288 folles) A/ D N FILEPICYS - MYL-TYLS AN « Dominus Noster Filepicus Multus Anni », (Notre seigneur Phlippicus pour de nombreuses années). Buste couronné de Philippicus de face, vêtu du loros, tenant un globe crucigère de la main droite et un scipio de la main gauche surmonté d’une croisette. R/ VICTORIA – AVSUΔ/ -|-// CONOB « Victoria Augusti », (La victoire de l’auguste). Croix potencée posée sur trois degrés. Tolstoi 4 – Ratto 1714 – Do 1d – BN/ B 2 – MIB 3/ 1 – BC 1447 (1250£) - MRB 18/1 (2500€) Superbe exemplaire, centré des deux côtés. Des faiblesses. Buste finement détaillé. Joli revers. Patine de collection. Très rare. SUP 900€/ 1 800€ La lettre d’officine delta (Δ = 4e officine) semble regravée sur un dzeta (Z = 7e officine). Les choix religieux de Philippicus entraînèrent la disparition du buste du Christ du droit (querelle monophysite) qui reposait sur la double nature du Christ (humaine et divine) mise en place par le concile de Nicée en 325, confirmé par celui de Calchédoine en 451, mais combattu par l’Église d’Orient. La nature divine du Christ doit empêcher sa représentation. Philippicus est représenté avec le loros, riche vêtement orné de pierreries, véritable manteau cérémoniel. L’empereur, outre le globe crucigère, tient le scipio, symbole de la prise du consulat. Monnaie provenant de la vente Roma Numismatic, E-Sale 101, lot n° 1607 Notre pièce illustre parfaitement une période de crise que traverse alors l’empire byzantin qui constitue une période de rupture entre deux dynasties ballottées entre les dangers extérieurs et les conflits intérieurs. Les monnaies sont souvent rares, voire très rares du fait de la brièveté des règnes, et les monnaies frappées en dehors de Constantinople le sont encore plus, symbole de la fin du rayonnement de l’Empire dans les Balkans et en Italie, pour preuve, en trois décennies, en dehors de notre solidus de la quatrième officine, nous n’avons proposé que trois solidi, un de la huitième officine et deux de la dixième ainsi qu’un semissis et un tremissis. Marie BRILLANT & Laurent SCHMITT PHILIPPICUS : UN INTERMÈDE BYZANTIN Lb 87 : 70€
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