Bulletin Numismatique n°252 46 Le solidus de Justin II de la prochaine Live Auction du 3 juin 2025 pourrait sembler anodin s’il ne présentait une marque énigmatique à l’exergue de son revers : OB XX. Que sont ces signes ésotériques, alors que sempiternellement, on trouve CONOB pour l’atelier de Constantinople, dans la plupart des cas. Nous allons essayer de répondre à cette question et de vous montrer que derrière un solidus qui semble classique se cache en fait une vraie rareté numismatique et un hapax qui trouve son origine dans l’histoire mouvementée de Byzance. EMPIRE BYZANTIN JUSTIN II (15/11/565-5/10/578) Justin II, neveu de Justinien Ier, épouse Sophie, la nièce de Théodora, en 548. Ils sont couronnés le 20 novembre 565. Justin privé de raison, c’est en fait Sophie qui gouverne avec l’aide de Narsès, général en chef en Italie, qu’elle finit par disgracier. Il ne sait pas faire face aux problèmes et aux invasions des Lombards en Italie, des Wisigoths en Espagne, des Sassanides en Orient. Fou, Justin se voit associer Tibère comme césar à partir de 574 et, pendant les quatre dernières années, c’est lui qui régna de fait. Tibère II est associé comme auguste en septembre 578. Justin meurt le 5 octobre. Créé par Constantin Ier au début du IVe siècle, vers 310, le solidus est une pièces d’une masse de 4 scrupules ou de 4,51 g (1 scrupule = 1,125 g) ou de 24 siliques ou carats poids. Entre Justinien Ier et Justinien II (527-695) comme l’indique Cécile Morrisson dans Byzance et sa monnaie (IVe – XVe siècle), RB 15, Paris 2015, p. 20 & tableau, p. 21 : « Une troisième innovation attire l’attention : l’émission d’une série de solidi de poids léger qui commence sous Justinien et se poursuit, avec une pointe d’émission sous Héraclius jusque sous Constantin IV et au début du premier règne de Justinien II. Ils sont clairement désignés à l’attention du public par une marque spéciale à l’exergue : le CONOB traditionnel est remplacé par OB* OBXX ou BO*, BOXX indiquant clairement le poids de la pièce : 20 carats. On rencontre aussi la marque OB* sur des poids de 21 1/2 (22) carats. Une série de 23 carats est frappée sous Maurice, Phocas et au début du règne d’Héraclius, qui conserve la marque CONOB et se distingue uniquement par la présence d’une étoile, au droit et au revers ». Sous Justin II, nous avons des solidi légers de 22 siliques (4,11 g) et de 20 siliques (3,76 g) d’après la masse théorique de 4,51 g. Ce poids s’effrite légèrement entre 491 et 668, s’établissant autour de 4,40 g avec un titre d’or dépassant 95 % voire 98 % d’or pur où se mêle 2 % d’argent. Les lettres OB seraient les initiales pour or pur (obryzium ou obryziacus), mais aussi la marque grecque numérale (OB ou BO) de la taille du nombre de solidi contenus dans une livre étalon (soit 72 par livre de 325 g environ). Ces solidi sont plutôt destinés a être utilisés à l’extérieur de l’Empire byzantin. Ils sont parfaitement identifiables par les changeurs puisqu’ils ne sont pas au poids classique. Ces solidi légers sont frappés pour l’atelier de Constantinople, mais aussi pour celui d’Alexandrie. Solidus léger de 20 siliques, Constantinople, 567-578, 10e officine. (Or, 3,66 g, 20 mm, 6h) (titre : 95-98 %, taille, 862/5 L. poids théorique : 3,76 g) A/ D N I-VSTI-NVS P P AVI « Dominus Noster Iustinius Perpetuus Augustus », (Notre seigneur Justin perpétuel auguste). Buste de Justin II, casqué, diadémé et cuirassé de face, tenant de la main droite un globe nicéphore et de la main gauche un bouclier orné d’un cavalier galopant à droite (N’a). R/ VICTORI-A AVGGGI/ -|-// OBXX « Victoria Augustorum// Obryzium XX », (La Victoire des augustes// d’or pur 20 siliques). Constantinople assise de face, la tête tournée à droite, tenant un sceptre long de la main droite et un globe crucigère de la main gauche. Tolstoi, 417/ 16 (50-60f. or), pl. 30 –BMC/ B – R - Do I/200, 9 – BN/B – MIB 2/ 9a, pl. 1 - BC 351 (1250£) – MBR 5.5NN (2000€) - BBC I/ 256 H. L. Adelson, Ligtht weight Solidi and Byzantine Trade during the sixth and seven Centuries, ANS NNM 138, New York, 1957, p. 147-149, n° 34-38, cf. 35 Superbe exemplaire, centré des deux côtés. Très beau buste finement détaillé. Joli revers. Patine de collection. Très rare. SUP 700€/1 200€ Monnaie montée anciennement et superficiellement treflée au droit. Dans son ouvrage ; H. L. Adelson, pour le règne de Justin II (565-578), avait isolé neuf solidi légers de 20 siliques pour l’atelier de Constantinople, 29 pour l’atelier d’Antioche de 22 et 20 siliques sans oublier 8 solidi de Justin II d’imitation barbare car ces monnaies furent aussi copiées. Aujourd’hui dans son ouvrage de référence (MIB 2), W. Hahn a identifié pour l’atelier de Constantinople des solidi de 22 carats (6 à 8) et de 20 siliques (MIB 2/ 9a à c), pour celui d’Alexandrie des solidi de 20 carats (15a et 15b) sans oublier celui de Ravenne pour de multiples variantes de solidi de 22 carats (MIB 2/ 22 a à e et 23). Pour notre type (MIB 2/ 9a), W. Hahn a recensé le deuxième (B) très rare et la dixième officine (I) comme pour notre exemplaire. Notre exemplaire correspond aux n° 34-42 (9ex.) du classement d’Adelson avec d’infimes variantes. Vous avez ainsi l’opportunité d’acquérir un rare solidus de poids léger du règne de Justin II (565-578). Mais la leçon la plus importante de cet article repose sur la lecture attentive de l’exergue de monnaies d’or qui semblent souvent identiques au premier abord, mais recèlent en fait de multiples identifications et attributions ! Marie BRILLANT & Laurent SCHMITT OB XX : QUÉSACO ?
RkJQdWJsaXNoZXIy MzEzOTE=