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Bulletin Numismatique n°247 42 démonétisées de 20 francs or aux millésimes de 1907 à 1914 réalisées entre 1951 et 1960, ont surpris tous les professionnels à leur apparition sur le marché en 1951 par leur qualité de frappe et leur couleur rougeâtre. Destinées à fournir des munitions au Fonds de stabilisation des changes pour orienter le marché, ces pièces ont pendant longtemps été considérées comme des monnaies, à l’instar de leurs modèles démonétisées, ce qui est une absurdité. Dans les faits elles sont différentes pour deux raisons incontestables. La première est une lapalissade : pour être une monnaie démonétisée il faut avoir été adoubé en tant que monnaie par un décret. Ces pièces, copies de monnaies démonétisées depuis 1926, n’ont jamais reçu ce sacrement. Les comptes-rendus des réunions du Conseil général de la Banque de France révèlent que Wilfrid Baumgartner, gouverneur de la Banque en 1951, précise que ces copies ne sont pas des « monnaies » mais des « médailles »9. C’est aussi ce dernier terme qui est utilisé par le ministre des Finances René Mayer dans sa lettre du 30 octobre 1951 adressée au gouverneur ordonnant le lancement de l’opération. Par ailleurs, ces copies se distinguent par leur couleur rougeâtre, différente du doré jaunâtre des populaires jaunets. Il y a exactement 10 ans j’avais fait réaliser des analyses de spectrométrie de fluorescence sur deux échantillons, volontairement mélangés, de monnaies et de copies de 20 francs. Ce test avait révélé une composition différente des alliages, dont un plus faible titre en or, compensé par un apport d’argent, ce qui expliquait les différences de couleurs évoquées plus haut. Dix ans après, ce sont les archives de la Banque qui viennent conforter cette conclusion. En effet dans l’inventaire de 1956, la Banque précise le titre des « Nouvelles pièces d’or de 20 francs », c’est-à-dire 5,789 grammes de fin par pièce (voir ci-dessous), ce qui se traduit par un titre de 897,3 millièmes au lieu du titre officiel de 900 millièmes. Mouvements de l’or en 1956 (archives de la banque de France) Photo : Yannick COLLEU Tout numismate sait que le franc germinal, unité monétaire deux fois centenaire qui s’est éteinte le 1er avril 200310, se traduit par 9/31 gramme d’or. Soit pour une pièce de 20 francs or par 5,80645162 grammes. À un titre « au rabais » la Banque de France a économisé 654,4 kilogrammes d’or fin. Dit autrement, les Français qui ont acheté ces copies de 20 francs ont été dupés de 654,4 kilogrammes d’or, soit au cours actuel de plus de 52 millions d’euros. En conclusion, ces copies sont indéniablement différentes des pièces d’origine. Pourtant les pratiques du commerce de métaux précieux continuent comme si de rien n’était, avec l’aval passif de l’administration fiscale qui refuse de se positionner concrètement sur cette situation héritée d’une forfaiture et qui lèse des milliers de consommateurs auxquels on impose une taxe de 11,5 % là où les critères de la littérature même de l’administration exonèrent de taxe11 les cessions de ces copies. Cette enquête a été en fait un voyage dans l’histoire de la France depuis la fin du XVIIIe siècle, passionnant et riche en découvertes. Rien de très novateur dans cette réflexion pour des numismates qui savent que la monnaie est le reflet intime de l’histoire d’un pays. Disponible à Librairie BoD , FNAC, AMAZON, CULTURA, LECLERC, etc. Yannick COLLEU L’OR DES FRANÇAIS : UNE ENQUÊTE SUR L’ÉPARGNE OR DES FRANÇAIS

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