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Bulletin Numismatique n°247 34 Je collectionne depuis une quinzaine d’années les monnaies françaises. Auparavant, j’ai collectionné pendant plus de 30 ans les timbres, mais n’habitant pas en France, j’ai collectionné les émissions du pays ou je faisais vie, c’est-àdire au Venezuela. Quand j’ai commencé à collectionner, j’achetais comme tout débutant les émissions qui venaient de sortir, mais après quelques années, j’ai compris que c’était une histoire sans fin. J’ai donc changé ma vision et je me suis spécialisé en ne collectionnant que la toute première série de 1859. Avec le temps et l’argent aidant, j’ai pu assembler une très belle collection que j’ai bien vendue quand j’ai senti que le vent tournait, et de nos jours la philatélie est très mal en point. Quelques années après, j’ai commencé à m’intéresser aux monnaies françaises, en choisissant peu de domaines bien définis, que j’ai réduits avec le temps étant donné la hausse des prix et la baisse de mes recettes. Je suis régulièrement les ventes aux enchères qui se déroulent en France et à l’étranger de monnaies principalement françaises, mais aussi anglaises, italiennes et espagnoles. De façon générale, les prix réalisés sont encore à la hausse pour de nombreuses pièces exceptionnelles. En fait, plus on recule dans le temps et plus les monnaies dans des états de conservation hors du commun sont rares ou très rares, d’où les prix chaque fois plus élevés. Je collectionne uniquement les monnaies en argent de très belle qualité, mais avec le temps, j’ai compris qu’il était économiquement bien plus intéressant de collectionner les monnaies en or qui se revalorisent généralement davantage. Je pense même que si j’avais investi en or de bourse au lieu de collectionner, j’aurais probablement aujourd’hui un capital plus conséquent. Je tiens à préciser que je ne regrette pas mon choix, c’est uniquement une constatation. C’est un fait qu’avoir de l’argent sur un compte en banque ne procure pas un plaisir particulier à la différence d’une collection ! Quand j’étudie les prix réalisés pour différents types de pièces, l’or est toujours gagnant par rapport aux autres métaux. La réalité est que les monnaies les plus prestigieuses sont en or et les personnes fortunées ont une préférence marquée pour ce type de monnayage, que les monnaies soient romaines, royales ou du XIXe siècle. Dans de nombreuses occasions, les pièces qui se vendent le plus cher sont des essais ou des flans brunis. Je précise que ceci est cependant valable pour les très belles pièces et plus la pièce est rare et plus le prix tendra à la hausse, par contre ce n’est pas le cas pour celles qui sont dans un état courant. Aujourd’hui par exemple une 20 francs 1811A qui n’est pas une monnaie rare a une valeur qui oscille autour de 700€ en AU55 (TTB), par contre la même pièce en MS65+ en vaut 8 000€ ; la différence de prix est due au fait qu’en TTB il existe plusieurs centaines de pièces, mais il y en a une seule en MS65+. Si un collectionneur est intéressé par cette pièce en TTB, il ne va pas mettre n’importe quel prix car il sait que cette monnaie n’étant pas rare, il la trouvera ultérieurement, ce qui ne sera pas le cas pour celle en MS65+. De façon générale, les très belles monnaies en argent sont bien plus rares que celles en or, et celles en cuivre le sont davantage, l’explication étant la thésaurisation, mais cela ne change rien à la réalité des prix du marché ! J’ai constaté également que les pièces en argent exceptionnelles et parfois uniques dans une qualité donnée (MS66, MS67, MS68) obtiennent des prix inimaginables. En suivant les ventes aux enchères au niveau mondial, on peut remarquer que les hausses diffèrent selon le pays et cela peut s’expliquer de la façon suivante. Quatre facteurs interviennent sur les prix des monnaies d’un pays en particulier ; le nombre de collectionneurs de ce pays, le niveau de vie, le nombre de personnes à l’étranger qui collectionnent ce pays et finalement si la numismatique est considérée aussi comme un type d’investissement. Pour ce qui est des domaines anciens propres à un pays comme par exemple pour la France les gauloises ou les féodales, la quantité de collectionneurs dans les pays développés a diminué avec le temps étant donné la hausse des dépenses avec une stagnation des salaires et l’incertitude économique. Par contre, l’apparition de l’Euro en tant que monnaie a déclenché un certain engouement pour ce type de collection qui est en fait très abordable, mais il y a énormément de stock et je ne vois pas de hausse dans ce domaine particulier dans le futur. La quantité de collectionneurs d’un pays, ainsi que le niveau de vie, sont liés au développement économique du pays, à sa culture et à son éducation. Si l’économie d’un pays a tendance à se dégrader, le niveau de vie baissera systématiquement, les personnes auront tendance à faire des économies et le superflu sera mis de côté. D’autre part si la population ne s’identifie pas à l’histoire du pays, alors il y a peu de chance qu’elle s’identifie à sa monnaie et dans cette mesure, pourquoi collectionner les pièces de ce pays ? Dans le cas des pays qui ont une forte croissance, il y aura dans le temps un essor de leur numismatique. Maintenant, comment expliquer qu’un essai d’une pièce de 100 francs or de Napoléon III connu à 2 ou 3 exemplaires va partir à 250 000€, alors qu’une 5 pounds de Victoria de 1839 verra son prix osciller autour de 500 000€ sachant qu’il en existe une bonne centaine ! Il y a de toute évidence bien plus d’amateurs fortunés intéressés par la pièce anglaise et une explication probable est que les ex-colonies anglaises sont de nos jours bien plus riches que les ex-colonies françaises ! Finalement, quant au fait de considérer les monnaies comme un investissement, je pense qu’il y a en réalité très peu de pays où c’est le cas hormis les États-Unis. Il est évident que lorsque l’on collectionne, c’est par passion, cependant, selon les montants que vous dépensez, il est intéressant, voire indispensable d’analyser l’évolution que va suivre la numismatique, car cela vous permettra d’anticiper ! Le problème est que cette recherche prend du temps et en général cela est un travail personnel. A défaut de temps ou de connaissances, il faudra chercher conseil ailleurs ! Actuellement nous rentrons dans une période de fortes turbulences économiques qui auront d’importantes répercussions dans de nombreux domaines dont la numismatique, alors préparez-vous. Yves BLOT RÉFLEXIONS NUMISMATIQUES

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