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Bulletin Numismatique n°245 42 Le 31 mai 2024, il y a quelques mois, a pris fin l’année du centenaire du prince Rainier III de Monaco qui était né le 31 mai 1923. Tout au long de cette année du centenaire, de mai 2023 à fin janvier 2024, de nombreuses manifestations variées ont été organisée pour rappeler ce que fut ce personnage historique d’exception aux multiples talents, sur lequel il y aurait encore beaucoup à écrire. On sait moins qu’il joua un rôle essentiel dans la survie et la pérennisation de la monnaie monégasque et ses émissions monétaires dépassèrent en volume toutes celles de chacun de ses prédécesseurs depuis la première émission monétaire monégasque en janvier 1640. On ignore souvent, de surcroît qu’il était lui-même numismate et connaisseur des monnaies auxquelles il donna un musée à Monaco, l’actuel musée des Timbres et des Monnaies. Rainier III régna 56 ans, de 1949 à 2005. Seuls régnèrent plus longtemps que lui Honoré II (1604-1662) et Honoré III (1733-1793) soit respectivement 58 et 60 ans. Par suite de l’abdication de sa mère la princesse héréditaire Charlotte de Monaco (1898-1977), en 1944 à sa majorité, il succéda directement à son grand-père le prince Louis II (1870-1922-1949) au décès de celui-ci en 1949. Rainier III allait alors avoir 26 ans. MONACO EN 1949 : UN PAYS PRESQUE RUINÉ Au lendemain de la guerre de 1939-1945, la Principauté de Monaco était devenue méconnaissable par rapport à la Belle Époque où elle avait connu la prospérité. Elle était tombée en pleine déconfiture. Elle avait subi la guerre, une triple occupation : la France de Vichy, l’Italie de Mussolini, l’Allemagne d’Hitler. Elle était pratiquement ruinée et son port de la Condamine avait été détruit par les bombardements de 1944. Le Casino était exsangue, les hôtels fermés, tandis que les Italiens, qui étaient les plus nombreux en 1939, étaient devenus indésirables à la Libération. Monaco avait échappé de très peu à un rattachement autoritaire et forcé à la France que désirait le commissaire régional de la République à Marseille Raymond Aubrac, résistant communiste, auquel s’opposa le chef des communistes niçois Konopnicki ; le général de Gaulle, consulté par Aubrac, ne put que désavouer celui-ci en regrettant toutefois qu’il n’ait pas effectué son coup de force sans demander l’autorisation… C’est dire si, à l’époque, Monaco comptait peu pour la France qui exerçait alors sur la Principauté un protectorat tatillon fondé sur un traité léonin de 1918 renforcé par une convention générale de 1930, accentuée par des conventions particulières en 1945. À titre d’exemple, la France refusa en 1947 au prince Louis II de faire frapper une médaille d’or pour son jubilé de 25 ans (1922-1947) alors qu’elle l’autorisa à la même époque pour le bey de Tunis. LES OBJECTIFS DE RAINIER III, NATIONALISTE FÉRU DE DÉCOLONISATION Monégasque par sa mère la princesse Charlotte, fille de Louis II, français par son père le comte Pierre de Polignac devenu par son mariage prince Pierre de Monaco, Rainier III fut tout au long de sa vie passionnément monégasque. Dès son avènement, il se fixa deux objectifs majeurs : • Agir pour que la Principauté de Monaco recouvre pleinement son indépendance qui avait été reconnue en 1861 et contestée depuis 1918 ; • Assurer la promotion économique de Monaco ainsi qu’un niveau de vie élevé à l’ensemble de ses habitants. À l’issue de ses 56 ans de règne, Rainier III avaient pleinement atteint ces deux objectifs. 1° - Le recouvrement progressif de l’indépendance de Monaco Vu la taille de Monaco et la faiblesse de sa population, la décolonisation ne pouvait être que pacifique. Le retour à l’indépendance et à la pleine souveraineté de la Principauté impliquait la fin du protectorat français de fait, instauré par le traité inégal franco-monégasque du 17 juillet 1918, confirmé et aggravé par la Convention du 28 mai 1930, encore aggravé par les conventions particulières de 1945 et des années suivantes. Après de multiples péripéties dont un conflit ouvert avec le général de Gaulle en 1962-1963 puis larvé avec Lionel Jospin en 1999-2000 (affaire Peillon-Montebourg), le protectorat français a définitivement pris fin au début du XXIe siècle par la signature, avec la France, du traité du 24 octobre 2002 et de la convention du 8 novembre 2005 qui ont remplacé les textes précités de 1918 et de 1930. Désormais, la Principauté de Monaco, qui dispose d’eaux territoriales depuis 1986, qui a été admise à l’ONU en 1993 et au Conseil de l’Europe en 2004, ainsi que dans la zone Euro, est redevenue pleinement indépendante dans le cadre d’une communauté de destin avec la France. Celle-ci a conservé la jouissance de privilèges importants à Monaco, notamment dans le domaine financier, fiscal et douanier. Accessoirement, Rainier III dut protéger son pays de la mainmise de certains prédateurs, tels que l’armateur grec Aristote Onassis, dit « le Grec », successeur du marchand de canons Basil Zahoroff, prédateur précédent des années 1920-1930. Désormais, la Principauté de Monaco se gouverne seule, la France pouvant fournir, sur sa demande, une assistance administrative et technique : Ministre d’État (équivalent d’un Premier ministre), fonctionnaires, magistrats etc. L’union douanière entre la France et Monaco, instituée en 1865, est confirmée, de même que l’assujettissement fiscal des Français de Monaco décidé en 1963. APRÈS LA CÉLÉBRATION DU CENTENAIRE DE RAINIER III DE MONACO : LE BILAN MONÉTAIRE D’UN CHEF D’ÉTAT NUMISMATE

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