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Bulletin Numismatique n°244 60 Méfiez-vous quand vous devez classer un tétradrachme des Celtes du Danube. Les critères de reconnaissance et d’attribution sont souvent trompeurs. Ainsi notre exemplaire n’était-il pas présenté comme un tétradrachme « W Reiter » ou cavalier au W, mais sous un vocable complètement différent au rameau « Reiter mit zweig » qui se rencontre en Transylvanie alors que notre exemplaire se trouve en région Subcarpathique. Il ne correspondait pas du tout à notre type qui se caractérise par un cavalier au pas à gauche avec un zizag au-dessus du cavalier et deux petits rinceaux placés à l’exergue sous les jambes du cheval qui peut devenir ainsi une enseigne. Notre prototype avec le cavalier macédonien à gauche, coiffé du pétase et de la chlamyde et qui a souvent été identifié comme Philippe luimême, a été frappé pour les ateliers de Pella ou d’Amphipolis, au début du règne avant 349-348 avant J.-C. L’introduction progressive du second type avec le cavalier, tenant la palme, marqueur de la victoire de Philippe II aux Jeux olympiques de 356 avant J.-C., vient ensuite et deviendra le type le plus fabriqué et le plus courant de Philippe II et de ses successeurs. Ce sont des détails, mais qui ont leur importance ! CELTES DU DANUBE - IMITATIONS DES TÉTRADRACHMES DE PHILIPPE II ET DE SES SUCCESSEURS (IIIe-Ier siècles avant J.-C.) Sous ce titre sont regroupés généralement tous les monnayages qui ne possèdent pas d'attribution précise. Parfois, le terme de « Celtes de l'est » est proposé. Après que les Celtes aient pillé Delphes et se soient répandus en Grèce et en Asie Mineure, ils s'emparent d'une quantité importante de butin, grâce à leurs rapines. Les rois hellénistiques, Diadoques ou Épigones, les utilisèrent comme mercenaires dans leurs armées où le salaire moyen était normalement d'un statère d'or correspondant à cinq tétradrachmes d'étalon attique ou vingt drachmes. Les prototypes qui représentaient la tête de Zeus avec un cavalier furent largement copiés et imités dans l'ensemble des Balkans, le nord de la Macédoine et de la Thrace. La phase finale du monnayage se produit à la fin du IIe siècle ou au début du premier siècle avant J.-C. où il ne subsiste des traits du droit et du revers ainsi que des légendes plus qu'une face bombée d'une pièce pratiquement lisse des deux côtés. Tétradrachme « au cavalier et W », c. IIIe-IIe siècles avant J.-C. (Ar 14,00 g, 24 mm, 12 h) A/ Anépigraphe Tête barbue de Zeus laurée à droite, légèrement stylisée. R/ Anépigraphe Cavalier au pas à gauche ; au-dessus du cavalier deux lettres en monogramme ou zizag ; rinceaux sous le cheval. LT 9874 – KO 671 – Pink 332, p. 59, pl. XVII – Wien 1265 – Z – Göbl OTA 332, pl. 28 – Allen BMC/ CC, I p. 25, n° 22, pl. II Superbe exemplaire sur un flan idéalement centré des deux côtés. Portrait de toute beauté. Des faiblesses au revers. Patine grise avec de légers reflets dorés. Très rare. SPL/ SUP 1 200€/ 1 800€ L’exemplaire du Kunsthistorishes Museum Wien (n° 1265, pl. 79) provient de la collection Leypold en 1994 tandis que le numéro précédent (n° 1264, pl 79) provient du trésor de Juncad. Nous n’avons pas trouvé de liaison de coin pour notre exemplaire qui présente néanmoins une homotypie de contiguïté avec de nombreux exemplaires similaires. Ce tétradrachme connu sous le vocable « W Reiter » ou cavalier au W est en fait une déformation du tétradrachme de Philippe II de Macédoine. En réalité, le revers plus stylisé reprend le premier type du monnayage macédonien créé par Philippe II avec le roi coiffé du pétase macédonien au pas à gauche (GC 6678). Au droit, la tête de Zeus est de bon style et encore assez proche du prototype. Notre type subit les influences de plusieurs monnayages et en est une émanation. La datation de ce type serait ancienne, deuxième moitié du IIIe siècle ou début du IIe siècle avant J.-C. entre 250 et 180 avant J.-C. Ce fait est confirmé par la masse des exemplaires rencontrés qui est souvent supérieure à 14,00 g pour un poids théorique de 14,50 (tétradrachme d’étalon thraco-macédonien). Ce type se rencontre dans les régions du Banat de de la Transylvanie (actuelle Roumanie). Un exemplaire du musée de Vienne provient du trésor de Juncad. Ce tétradrachme est une invitation à découvrir un thème de collection d’une richesse et d’une diversité infinies couvrant une bonne partie de l’Europe orientale qui suit la vallée du Danube jusqu’à son delta et qui fait qu’à partir de prototypes, peu nombreux et ciblés, les différents peuples de ces régions ont su laisser libre cours à leur inspiration. Le monde celtique n’est pas seulement composé des Gaulois, mais aussi de ces peuples qui ont rayonné sur cette région jusqu’au Ier siècle après J.-C., repoussés dans leurs limites par les avancées de l’armée romaine et la fixation du limes sur le Danube ! Viviane BÉCLIN et Laurent SCHMITT CELTES DU DANUBE QUAND L’IMITATION DÉPASSE L’ORIGINAL

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