Bulletin Numismatique n°244 38 Faut-il rappeler que Syracuse fut fondée par des colons Doriens venus de Corinthe vers 733-732 avant J.-C. ? Quand on examine cet exemplaire, en dehors de la légende du revers, il présente l’ensemble des caractéristiques du monnayage corinthien : Pégase volant au droit et tête d’Athéna coiffée du casque corinthien au revers. Ce qui en fait un statère syracusain avec les épisèmes corinthiens, c’est justement la légende Συρακοσων qui s’étale devant le visage d’Athéna. Accompagnant le statère, lui sont associés la drachme corinthienne (le tiers du statère) et l’hémidrachme. Depuis l’origine, c’était l’étalon attique qu’utilisait Syracuse. Si la cité adopte l’étalon corinthien, c’est que Timoléon, en s’emparant du pouvoir, est venu avec une armée de mercenaires grecs, principalement péloponnésiens. La mort précoce du général corinthien, devenu aveugle, en 337-336 avant J.- C., n’interrompit pas l’utilisation de l’étalon corinthien. Agathoclès, tyran de Syracuse (317-305 avant J.-C.) avant de prendre le titre de basileos à la suite des Diadoques et des Épigones en 305 avant J.-C. (305-289 avant J.-C.), conserva les premières années le statère corinthien (317-310 avant J-C.), mais en abaissa la masse (6,90 g) pendant la période 305-295 avant J.-C. Dans l’ouvrage de Romolo Calciati, Pegasi, 2 vol. 1990, consacré au monnayage de Corinthe et de ses colonies, dans le volume II, le chapitre Syracuse occupe les pages 605-618. Il est très documenté et notre statère correspond au type 2 de son catalogue. Mais notre statère présente quelques variantes avec l’original que nous déterminerons plus loin. SICILE – SYRACUSE – TROISIÈME DÉMOCRATIE (344-317) Timoléon (344-337-336 avant J.-C.) et troisième Démocratie Après l’assassinat de Dion en 354 avant J.-C., une période d’instabilité s’ensuivit pendant dix ans. Timoléon, originaire de Corinthe, débarqua en Sicile en 344 avant J.-C. et prit le contrôle de Syracuse. Il restaura l’hégémonie grecque en Sicile en chassant les Carthaginois après la bataille de Crimisus en 339 avant J.-C. Il constitua un gouvernement démocratique qui ne devait malheureusement pas lui survivre, Agathoklès s’emparant du pouvoir à partir de 317 avant J.-C. Néanmoins, pendant une vingtaine d’années, Syracuse connut une période de paix qui lui permit de rétablir ses finances et de développer un programme de construction urbaine important, accompagné du retour de la prospérité agricole. Statère corinthien, Syracuse 341-317 avant J.-C. (Ar, 8,67 g, 23,50 mm, 6h) (étalon corinthien, poids théorique 8,50 g ; 10 litra, 3 drachmes ou 18 oboles) A/ Anépigraphe Pégase volant à gauche. R/ ΣΥΡΑΚΟΣΙΟΝ (de Syracuse). Tête d’Athéna à droite, coiffée du casque corinthien. ANS 399 – MIAMG 5008 – Delepierre 690 – Dewing 931 var. – GC 961 – HGCS 2/ 1400 (R1) Pegasi, p. 607, n° 2 Magnifique exemplaire sur un flan large et bien centré. Portrait de toute beauté, bien venu à la frappe. Joli Pégase. Patine grise avec de légers reflets dorés. Rare. SUP 750€/ 1 500€ Notre exemplaire présente une particularité qui ne semble pas avoir été signalée. En effet, à la pointe du casque d’Athéna au revers, nous semblons distinguer un conque dont le corps semble prendre naissance dans le couvrenuque du casque. Cette coquille de gastéropode était utilisée comme instrument de musique. Pendant la tyrannie de Timoléon, Syracuse était sous l'influence corinthienne. Il existe des monnaies en or de 30 litrai et des statères d'argent de 10 litrai. La litra valait les 6/5e de l'obole (10 litrai = 18 oboles ou un statère). Notre exemplaire parfaitement centré des deux côtés est de qualité spectaculaire. La disposition de la légende embrassant le contour de la tête d’Athéna constitue une sorte de carapace, un rempart. Le choix de coller l’ethnique syracusain n’est pas anodin, il épouse complètement le sujet et renforce le relief et la force du portrait. Un moyen politique de rappeler l’osmose entre Syracuse et sa métropole fondatrice ? Marie BRILLANT et Laurent SCHMITT SYRACUSE ET CORINTHE : MÊME COMBAT !
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