cgb.fr

Bulletin Numismatique n°244 34 Tout le programme du nouveau monnayage, créé en 126/125 avant J.-C., est inscrit dans la légende du revers : sainte et sacrée. Le message n’est pas seulement politique et marque une autonomie par rapport au pouvoir séleucide. C’est Alexandre II Zébina qui règne alors à Antioche. Après avoir été pendant très longtemps sous domination égyptienne, puis lagide pendant les guerres de Syrie, elle passa sous domination séleucide à partir d’Antiochus III le Grand (222-187 avant J.-C.) lors de la cinquième guerre (201-195 avant J.-C.). En 126 avant J.-C., c’est Cléopâtre Théa, épouse successive de trois souverains séleucides dont Démétrius II Nicator, qui accorde l’autonomie afin, peutêtre, de faire oublier la part prise dans la disparition de ce dernier. En recevant l’autonomie, Tyr se voit dotée aussi du caractère sacré, lié à l’asylum (droit d’asile et de protection) que renforce le caractère religieux. Cette autonomie n’est pas seulement un contrat passé entre deux entités, elle revêt un aspect d’inviolabilité. C’était aussi la dédicace que Michel Prieur plaçait sur la page de garde de son ouvrage consacré aux tétradrachmes syro-phéniciens, publié en 2000 : « ΙΕΡΟΥ/ ΑΣΙΛΟΥ ». Le monnayage autonome de Tyr va traverser les conflits de la fin des IIe et Ier siècles avant J.-C. Il survit à la conquête romaine de la Syrie par Pompée en 63 avant J.-C., aux guerres civiles que se livrent Républicains et Césariens, puis entre les partisans d’Antoine et de Cléopâtre, opposés à ceux d’Octave, enfin à l’instauration du Principat. C’est à la veille de la révolte de Judée en l’an 191 (65-66 après J.-C.) que ce monnayage prend fin. Nos tétradrachmes appartiennent à la première phase du monnayage, la plus ancienne qui débute en l’an 1 (126-125 avant J.-C.) et prend fin en l’an 71 (55-54 avant J.-C.). Sur notre premier exemplaire le chiffre 10 est précédé de la lettre L qui vient de l’influence égyptienne pour marquer l’année. L’étalon monétaire utilisé est le phénicien dont le poids théorique est d’environ 14,00 g. Le titre de ces monnaies est élevé, en très bon argent, ce qui a facilité son adoption et surtout son utilisation dans ces régions, dépassant les 95 %. Outre le shekel ou tétradrachme, nous avons des demi-shekel et de très rares quarts et huitième de shekel. Le type retenu pour le shekel et le demi-shekel est celui de Melqart (Héraclès sémitique) imberbe et lauré, parfois avec la léonté, nouée autour du cou (dépouille du lion de Némée). Au revers, l’aigle (d’inspiration lagide avant de devenir séleucide) est debout à gauche, les serres posées sur un gouvernail qui rappelle la situation et le rôle maritime de la cité, un des principaux ports de la région. Une palme est visible sur l’aile de l’aigle et une massue se trouve placée dans le champ à gauche devant l’aigle et renforce le lien avec Héraclès. La date placée dans le champ à gauche est complétée par un monogramme placé en général derrière l’aigle. PHÉNICIE – TYR (IIe siècle avant J.-C. – Ier siècle après J.-C.) Tyr, d’après la tradition, semble avoir été fondée par des colons venant de Sidon, sa grande rivale. Des colons tyriens fondèrent Carthage en 814 avant J.-C. Tyr était l’un des principaux ports de Phénicie et l’une des places commerciales les plus importantes de la Méditerranée orientale. Tyr refusa de se soumettre à Alexandre le Grand en 332 avant J.-C. Le siège de la ville dura sept mois de janvier à août dans des conditions très difficiles. Alexandre se montra impitoyable et fit massacrer ou réduisit en esclavage la population. Tyr ne disparut pas et fut rebâtie. Après la mort d’Alexandre, elle changea souvent de maître : Perdiccas en 321 AC., Ptolémée l’année suivante, puis ce fut le tour d’Antigone le Borgne en 314 avant de repasser dans les mains de Ptolémée deux ans plus tard. En 294 avant J.-C., Tyr entra dans l’orbite séleucide. Après 274 avant J.-C., une nouvelle ère semble débuter pour Tyr. La ville sera autonome après 126 avant J.-C. et connaîtra un nouvel essor politique, économique et monétaire qui perdurera sous la domination romaine. Tétradrachme ou shekel, Tyr, Phénicie, 117-116 avant J.-C. (an 11) LΙ/ΣΑ (Ar, 14,31 g, 27,50 mm, 12 h) (étalon phénicien, poids théorique : 14,00 g, 4 drachmes ou 24 oboles) BMC 67 – HGCS 10/ 357 – DCA 919 – DCA 2. 946/10 – DCA Tyre 23 Magnifique exemplaire sur un flan idéalement centré des deux côtés. Buste de toute beauté, finement détaillé et bien venu à la frappe. Joli revers. Patine grise avec de légers reflets dorés. Rare. SPL 2 000€/ 3 200€ Tétradrachme ou shekel, Tyr, Phénicie, 98-97 avant J.-C. (an 29) ΘΚ/ (HAP) un épi ou une palme devant la patte de l’aigle dans le champ à gauche. (Ar, 14,31 g, 28,50 mm, 1 h) (étalon phénicien, poids théorique : 14,00 g, 4 drachmes ou 24 oboles) BMC 114 – HGCS 10/ 357 – DCA 919 – DCA 2. 946/29 – DCA Tyre 105 TYR SAINTE ET SACRÉE !

RkJQdWJsaXNoZXIy MzEzOTE=