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Bulletin Numismatique n°244 17 Indirectement, nous avons déjà abordé ce sujet dans le Bulletin Numismatique (BN n° 227, 21) en évoquant la figure de Tryphon, usurpateur du trône séleucide, ayant assassiné Antiochus VI ou aidé à le faire disparaître. C’est donc l’image du roi-enfant que nous allons évoquer ici. Né après 150 avant J.-C., l’enfant avait moins de sept ans lors de son décès. Quand on évoque Antiochus VI, il faut aussi en filigrane revenir sur sa mère, Cléopâtre Théa, fille de Ptolémée VI Philometor, pharaon d’Égypte et de sa sœur épouse Cléopâtre II. Elle est aussi la sœur épouse de Ptolémée VII Eupator. Elle a été offerte par son père en mariage à Alexandre Ier, au début de son usurpation, afin d’affaiblir le royaume Séleucide. En épousant successivement Démétrius II Nicator, puis Antiochus VII Sidétes, elle est la source de toutes les guerres qui vont déchirer le royaume pendant plus d’un demi-siècle, le conflit se perpétuant après ses fils avec l’ensemble de ses petits-enfants, origine finalement de la dégénérescence du Royaume et finalement de son absorption par les Romains en 63 avant J.-C. avec la conquête et la provincialisation de la Syrie. Mais revenons à Antiochus VI, qui n’aura été qu’un instrument entre les mains de Diodote, déjà présent sous son père, Alexandre, et sorte de régent sous le « règne » du jeune souverain avant de l’éliminer. La preuve se trouve sur les monnaies elles-mêmes du principal atelier du monarque, Antioche sur l’Oronte, fondée en 300 avant J.-C. par le fondateur de la dynastie, Séleucus Ier Nicator. En effet dans la titulature très complète du jeune souverain au revers de notre tétradrachme, nous trouvons les initiales de son futur assassin (TRY) pour Tryphon. Au droit, Antiochus est le premier et le seul monarque séleucide à être représenté sous les traits d’Hélios radié et diadémé sur le monnayage d’argent, entouré de la stemma, bandelette de laine, symbole de donations (évergétisme) au sanctuaire de Delphes. Son visage semble juvénile, mais ne traduit pas les traits d’un enfant âgé de cinq ans au plus, au moment de l’adoption du type en 144 avant J.-C. Pour le revers, c’est aussi le cas. Nous avons évoqué dans les colonnes du BN 244, la filiation et le devenir des Dioscures (Castor et Pollux). Ils sont représentés en cavaliers nus, vêtus de la chlamyde flottante sur leurs épaules, coiffés chacun d’un bonnet, surmonté d’une étoile et tenant une javeline à double pointe. La couronne dionysiaque au revers, bien que rare, est un symbole qui accompagne la dynastie. Il est aussi l’un des titres du roi enfant (Dionysos). Antiochus VI Dionysos (145-142 avant J.-C.) Antiochus VI Dionysos, le fils d’Alexandre Bala et de Cléopâtre Théa, fut proclamé roi par le général Diodote pour lutter contre Démétrius II. Une fois Antiochus VI assassiné par par Diodote en 142 avant J.-C., celui-ci se fit proclamer roi sous le nom de Tryphon (142-138 AC.). Démétrius II fut capturé en 140 avant J.-C. par les Parthes et c’est son frère Antiochus VII Sidetes qui lui succéda. Cléopâtre Théa s’empressa de l’épouser. Tetradrachme, Syrie, Antioche, 144-143 avant J.-C. (an 169 de l’ère séleucide) (Ar, 16,88 g, 30,50 mm, 12 h) (Étalon attique réduit, poids théorique : 17,00 g ; 4 drachmes) A/ Anépigraphe Tête diadémée et radiée d’Antiochus à droite, entourée de la stemma. R/ BASILEWS/ ANTIOCOU/ EPIFANOUS/ DIONU− SOU// TRU/ OR/ STA/ (AUR) (du roi Antiochus glorieux Dionysos/ Tryphon/ an 170). Les Dioscures galopant à gauche coiffés des bonnets surmontés d’étoiles, le manteau flottant au vent, tenant des javelines transversales ; le tout dans une couronne dionysiaque. B 994 - SMA 252 – CSE – Spaer – SC 2/ 2000/3d - HGCS 9/ 1032 Flan large, idéalement centré des deux côtés. Très joli portrait d’Antiochus, bien venu à la frappe. Joli revers. Patine grise avec de légers reflets dorés. Très rare. SUP 1 500€/ 2500 € Le monnayage d’Antiochus VI Dionysos fut important pour l’atelier d’Antioche. Sur les monnaies d’Antiochus VI, le monogramme, placé derrière les Dioscures TPY est pour Tryphon (Diodote) qui fut d’abord le mentor du jeune souverain avant de le remplacer après l’avoir laissé assassiné. A. Houghton et C. Lorber ont mis en lumière cinq variétés principales pour les années 169 et 170 (144/143 - 143/142 avant J.-C.) de l’atelier d’Antioche avec vingt-sept marques de contrôle différentes. Les monnaies pour l’an 170 sont beaucoup plus rares que celles de l’année précédente et ne comportent au total que six monogrammes. Notre monogramme peut présenter trois variétés différentes, celui de notre exemplaire étant la forme la plus rare. Ce type existe aussi avec notre mongramme, sans (SC 2000/5b = SMA 423243). Un exemplaire de notre type est signalé, provenant de la vente Egger, de novembre 1909, n° 423, pl. XV. L’histoire de la dynastie Séleucide, comme la Lagide, est un véritable roman qui début à la mort d’Alexandre III le Grand, où Séleucus Ier et Ptolémée Ier, Diadoques du conquérant, ouvrent la voie aux Épigones, et tous leurs successeurs à des conflits interminables pour la domination du monde hellénistique. Leurs luttes fratricides laissent la voie libre aux Romains qui finiront par les soumettre et les absorber. Nous pensons que vous ne pourrez plus jamais regarder un tétradrachme d’Antiochus VI sans penser à son destin tragique, roi à peine sorti de l’enfance et mort avant l’adolescence, sujet qui aurait pu être retenu par Shakespeare pour l’une de ses tragédies. Marie BRILLANT et Laurent SCHMITT ANTIOCHUS VI DIONYSOS OU TRYPHON : CHERCHER L’ERREUR

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