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Bulletin Numismatique n°243 34 Dans la boutique « Grecques » un nomos ou didrachme (statère) de Tarente a retenu notre attention (bgr_913328). Il appartient à la période archaïque du monnayage, aux premiers groupes du monnayage déterminé et étudié par Wolfgang Fischert-Bossert en 1999*, frappé entre 510 et 450 avant J.-C. Cette pièce s’intègre dans le groupe 4 du classement du savant allemand (n° 70-90). Notre nomos présente une trace de double frappe au droit sur le dauphin. Il semble bien qu’il puisse être identifié avec le n° 73 de son classement (A/ 33 – R/ 55). Le droit est caractéristique avec la jambe de l’éphèbe nu (Taras ou Phalantos) chevauchant le dauphin, descendant en arrière. L’auteur a recensé sept exemplaires pour le coin de droit. En revanche le coin de revers (R/ 55) est lié au coin de droit (A/ 32 (16 ex.), 33 (19 ex.), 34 (7 ex.), 35 (7 ex.), 36 (2 ex.), 37 (8 ex.), 38 (7 ex.) 39 (16 ex.), 40 (11 ex.), 41 (45 ex.) et 43 (4 ex.) pour un total de 132 ex. pour le même coin de revers pour les n° 70-73, 75-81 et 84 de son classement. L’écart entre les exemplaires les plus légers en dehors de quatre exemplaires sous les 7,00 g varie entre 7,08 g et 8,26 g, la plupart des exemplaires ayant une masse comprise entre 7,90 g et 8,10 g. Les monnaies du groupe 4 se rencontrent dans le trésor de Lecce découvert en 1920 (IGCH 1903). Si le coin de revers (roue à quatre rayons) a été largement exploité, notre type reste rare pour le droit. TARENTE (Ve – IIIe siècle avant J.-C.) Tarente, fondée vers 706 avant J.-C. par les Parthénopéens, était la seule colonie de Sparte. En effet, d’après la mythologie, la cité aurait été fondée par Phalanthos, sur ordre de l’oracle de Delphes, non loin de l’embouchure de la rivière Taras. Une autre tradition antique raconte comment la cité fut fondée par Taras qui était le fils de Poséidon et de la nymphe Satyra. Il fut sauvé lors d’un naufrage par un dauphin qui le déposa près de la future cité et son nom désigne la ville. Il se trouva que les deux héros furent confondus. Tarente était la seule cité importante de cette région appelée Calabre par les Romains et districts de Messapia et de Iapygia par les Grecs. La nouvelle colonie prospéra rapidement et devint l’un des ports les plus importants de Méditerranée Occidentale grâce aux nombreux avantages liés à sa situation géographique, à la richesse de son arrière-pays avec des terres cultivables, des élevages réputés, le travail de la laine. Les Tarentins étaient des éleveurs et dresseurs de cheveux fameux. Mais la colonie était aussi réputée pour son vaste port sécurisé qui lui permit d’établir de fructueuses relations avec ses voisins et qui devint l’un des principaux ports de la Méditerranée Occidentale. La cité était reconnue aussi pour la qualité de sa pourpre, réalisée grâce à la collecte du murex, coquillage permettant d’obtenir la coloration si particulière. Le système politique de Tarente devait être calqué sur celui de sa métropole Sparte et Hérodote (I, 36) signale un roi contemporain de Darius Ier (521-486 avant J.-C.). Le culte d’Apollon Hyakinthos y était célébré et son origine spartiate est indéniable. À partir de 380 avant J.-C., les destinées de Tarente se retrouvèrent entre les mains d’Archytas de Tarente (460360 avant J.-C.), philosophe pythagoricien, ami de Platon, mathématicien, astronome, homme politique et général qui fut placé sept fois à la tête de sa cité. On le donne pour l’inventeur de la vis, de la poulie, de la crécelle et du cerf-volant. Horace lui consacra une ode. La fondation panhellénique de Thurium en 443 avant J.-C. avait donné naissance à un conflit qui devait opposer Tarente à Athènes pendant plus de trente ans à partir de 436 avant J.-C. Les deux cités rivales avaient fini par fonder Héraclée en 432 avant J.-C., néanmoins sous influence tarentine. Les Tarentins finirent par s’imposer sur les villes de Métaponte et de Siris. Archytas, dans la première moitié du quatrième siècle avant J.-C., devint le stratège de la confédération italiote dont la capitale était Héraclée et qui regroupait, outre Tarente, Métaponte et Thurium, Crotone, Vélia et Naples. Cette période d’hégémonie tarentine prit fin avec la mort d’Archytas et fut le point de départ des interventions de généraux mercenaires comme Archidamos de Sparte, Alexandre le Molosse ou Pyrrhus d’Épire. Tarente dut lutter contre les Lucaniens et fit appel en 345 avant J.-C. à Archidamos, roi de Sparte. Ce dernier essaya de contenir la progression des tribus lucaniennes. Malheureusement, Archidamos fut battu et tué à la bataille de Mandurias en 338 avant J.-C. La mort d’Archidamos obligea les Tarentins à trouver un nouvel allié pour contenir leurs turbulents voisins. Ils firent appel à Alexandre le Molosse, roi d’Épire et beau-frère d’Alexandre III le Grand de Macédoine. En arrivant en Italie du Sud, Alexandre le Molosse dut lutter contre les tribus d’Italie méridionale de Lucanie et d’Apulie, désireux de se constituer un royaume en Grande Grèce. Après la mort d’Alexandre d’Épire (330 avant J.-C.), les Tarentins continuèrent d’affronter les tribus de Lucanie et du Bruttium auxquelles s’ajoutèrent les Romains. Cette fois-ci, ils s’adressèrent à Kleonymos de Sparte pour les délivrer de ce double danger. Tarente et Rome avaient signé un traité naval en 303 avant J.-C. sur la neutralité des Tarentins en échange du respect de l’intégrité territoriale de leur cité par les armées romaines. Entre le départ de Kléonymos de Sparte en 302 avant J.-C. et l’arrivée de Pyrrhus, roi d’Épire, une vingtaine d’années plus tard, l’histoire de Tarente et de son territoire reste mal connue avec de nombreuses zones d’ombre sur les plans historique et monétaire. L’intervention du monarque épirote allait marquer le début du déclin de la cité tarentine. À la suite de l’arrivée de Pyrrhus en Italie, en 281 avant J.-C., le consul L. Aemilius Barbula dévasta le territoire des Tarentins après la destruction d’une escadre romaine dans le golfe de Tarente. Pyrrhus, grâce à ses éléphants et à la surprise générale, remporta l’indécise bataille d’Héraclée en 279 avant J.-C. d’où l’expression « victoire à la Pyrrhus » qui équivaut à une victoire qui laisse le vainqueur si TARENTE, UN STATÈRE ARCHAÏQUE BIEN MONTÉ !

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