Bulletin Numismatique n°236 39 cipée de J. Lafaurie et P. Le Gentilhomme en 1941, ce dernier fit entrer J. Lafaurie à la SFN (Société Française de Numismatique) puis au Cabinet des médailles grâce à la bienveillance de J. Babelon qui était à la fois un grand humaniste en même temps qu’un grand savant, n’en déplaise à certains sycophantes, ce qui n’est pas très courant. Doué d’une exceptionnelle capacité de travail, remarquablement méthodique, d’une rigueur intellectuelle absolue au service de la science et d’une parfaite loyauté, J. Lafaurie devint rapidement un pilier du Cabinet des médailles, de la Revue Numismatique, de la Société Française de Numismatique et de son bulletin le BSFN dont il fut le fondateur en 1945. Il reprit le catalogue Dieudonné de 1923-1932, le transforma et le modernisa pour en faire le tome 1 des Monnaies des rois de France. En même temps, il obtint le diplôme de l’École pratique des Hautes Études (EPHE) qui prima son ouvrage. Encouragé par J. Babelon et par A. Blanchet dont il était devenu le protégé après la mort de son maître P. Le Gentilhomme, J. Lafaurie devint un grand numismate, à la compétence reconnue de tous, tant en Europe que dans le monde. C’est pourquoi il fut élu directeur d’études à l’EPHE, c’est-àdire l’équivalent d’un professeur d’université ; en même temps il fut nommé conservateur au Cabinet des médailles. Malheureusement pour lui et pour tout le monde, son maître Pierre Le Gentilhomme, qui avait également converti Jean Vinchon à la numismatique au stalag, était mort tragiquement en 1947 dans des circonstances que tout le monde connaît mais qu’il reste encore opportun de dissimuler. En France, toute vérité n’est pas toujours bonne à dire. La mort de Le Gentilhomme aura des conséquences funestes sur la carrière professionnelle de J. Lafaurie. Pour la rédaction du tome 2 des Monnaies des rois de France consacré à la Renaissance (François Ier-Henri IV), J. Lafaurie s’associa alors à un éminent collectionneur, le meilleur connaisseur des monnaies royales françaises de l’époque, Pierre Prieur4, alors président de la SFN. Le père de ce dernier, Charles Prieur, avait déjà été président des la SFN dans les années 1930. P. Prieur avait été le premier numismate à travailler dans les archives depuis la mort de P. Bordeaux en 1925. J. Lafaurie et P. Prieur se partagèrent ainsi la tâche de la rédaction du tome 2 qui rencontra dans le public le même succès que le tome 1. Ils préparèrent alors les tomes 3 et 4 qui étaient prévus, à savoir Louis XIII-Louis XVI (tome 3) et les monnaies royales françaises frappées à l’étranger (tome 4). La parution du tome 3 était prévue pour les années 1960 et en 1967 un grand numismate professionnel parisien en annonça la parution imminente tandis qu’un autre utilisa certaines informations du manuscrit dans ses catalogues de vente. Au nom de l’objectivité scientifique et de la diffusion du savoir, J. Lafaurie avait mis en consultation au Cabinet des médailles l’un des deux exemplaires du manuscrit. G. Sobin y trouva les noms des maîtres et graveurs qu’il publia dans le catalogue de vente de sa collection en 1977. Un événement imprévu vint alors tout modifier. Au début de l’année 1957, Adrien Blanchet était mort dans sa 92e année. Après avoir chaperonné J. Lafaurie à la suite de la mort de P. Le Gentilhomme, il avait reporté sa protection, à partir de 1949-1950 sur un nouveau venu en numismatique le docteur Jean-Baptiste Colbert de Beaulieu (1905-1995). Après avoir exercé la médecine en France avant la guerre de 39-45, il était devenu directeur d’un laboratoire en Belgique occupée pendant toute la durée de celle-ci et on n’a jamais su quel fut son rôle exact durant cette sinistre période. D’un caractère tranchant et soucieux de faire carrière dans la numismatique au sein du CNRS qui l’avait engagé, Colbert de Beaulieu ne pouvait s’entendre avec Lafaurie, dépité de l’attitude d’A. Blanchet tout heureux d’avoir trouvé en Colbert de Beaulieu un amateur de monnaies gauloises, négligées depuis 50 ans. Aux réunions de la SFN, Lafaurie et Colbert de Beaulieu ne cessaient de s’opposer et à partir de la mort de Blanchet le conflit empira. Il trouva son aboutissement en novembre 1962 quand Colbert de Beaulieu, promis à la présidence de la SFN en mars 1963, insulta Lafaurie dans le bureau de Le Rider qui avait succédé à J. Babelon fin 1961, propulsé au poste de ce dernier par le brillant jeune ministre Valéry Giscard d’Estaing qui récidivera en 1974 en faisant de Le Rider, par le fait du prince, le « patron » de la BnF5. L’interminable conflit pluriel-annuel permanent entre Lafaurie et Colbert de Beaulieu avait créé un mauvais climat à la 4 Sans rapport avec Michel Prieur, fondateur de Cgb.fr, simple homonyme. 5 Le Rider avait d’abord été le protégé de l’archéologue Henri Seyrig, luimême protégé de la famille Giscard d’Estaing (l’homme politique Jacques Bardoux, grand-père de VGE) POURQUOI LE TOME III DU LAFAURIE-PRIEUR N’A PAS ÉTÉ PUBLIÉ
RkJQdWJsaXNoZXIy MzEzOTE=