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Bulletin Numismatique n°234 45 Un article récent dans le Bulletin Numismatique (réf.1) raconte que le premier portrait métallique de Napoléon Bonaparte (gravé dans les derniers mois de 1796) est lié à un dessin en crayon rehaussé d’aquarelle de Guiseppe Longhi qui a rencontré Napoléon à Milan pendant la première Campagne d’Italie (24 mars 1796 jusqu’au 7 avril 1797 – réf.2). L’article évoque également le fait que Napoléon avait - dès son jeune âge - bien compris l’importance de la propagande (réf. 3). Les premières pièces métalliques qui portent l’image de Napoléon et ses actions héroïques (réf.1) sont visiblement plus grandes que des jetons (diamètre 33 mm, poids plus que 10 grammes). Mais comme des jetons, ils sont frappés généralement en laiton, régulièrement argenté ou doré - exemples dans la figure ci-dessous. Et en plus, comme nous allons voir dans le présent article, l’indication IETTON est présente sur toutes les pièces de 1797. C’est pourquoi j’appelle aussi les deux pièces de 1796 des jetons. L’article de mars (réf.1) montre des images de six exemples ; deux pièces différentes sont présentées ci-dessous. Sur l’avers on voit le buste de Napoléon, âge 27 ans, regardant vers la droite et portant un vêtement brodé, bien similaire au vêtement que Bonaparte porte dans la peinture de Antoine-Jean Baron (pont d’Arcole, 17 novembre 1796 ; réf.4). Dans le catalogue numismatique de la Révolution française (réf.5), Hennin résume deux variantes de ce jeton : la première - Napoléon porte un vêtement fermé jusqu’au cou (Hennin 767), et la deuxième, considérablement plus rare que l’autre - Napoléon porte un habit avec les revers ouverts (Hennin 768). Les deux variantes de la médaille de 1796 avec le premier portrait en métal de Napoléon Bonaparte (pour les détails, voir réf. 1) : Hennin 767 (laiton doré, habit fermé) et Hennin 768 (laiton, habit ouvert). Le présent article, qui fait suite au précédent (réf.1), cherche la réponse à la question de savoir qui a gravé ce portrait emblématique et qui a créé ces jetons spéciaux. Dans cet exercice de réflexion, notre attention est principalement attirée sur un graveur de jetons jouissant déjà d’une renommée nationale ou internationale. Bien qu’il n’en existe pas de preuve définitive (les pièces de 1796 ne sont pas signées par le graveur), plusieurs arguments vont dans la direction de Ernst Ludwig Sigmund Lauer, maître graveur de jetons de la ville impériale de Nuremberg (réf.6-8). Les arguments sont les suivants : 1- Depuis le XVIe siècle, la ville de Nuremberg produisait régulièrement des jetons pour les pays étrangers, notamment pour la France. 2- Au moment de la première campagne d’Italie, Ernst Ludwig Sigmund Lauer (1762-1833) était déjà actif depuis 16 ans en tant que « meister Nürnberger werkstatt ». Sa réussite professionnelle est attestée par le fait que Lauer est considéré comme le père d’une dynastie de maîtres de Nuremberg spécialisés dans la fabrication de jetons (réf. 6-8). 3- En tant que jetonnier de Nuremberg, Lauer était connu sur le marché français avant 1796. Il avait par exemple réalisé des plus petits jetons (diamètre 2,5 cm, poids 4,85 g - Hennin 476) avec sa signature IETTON (avers) et LAUER (revers) à l’occasion de la mort de Louis XVI (21 janvier 1793). Jeton en laiton : « Mort de Louis XVI » (Hennin 476). Avers : tête de Louis XVI à gauche LUD XVI REX GALLIAE DEFUNCTUS - à l’exergue IETTON. Revers : la Justice tenant la balance et la corne d’abondance, debout, sur des nuages, AMAT AUREA CONDERE SAECLA ; à l’exergue: LAUER. Collection musée Carnavalet à Paris. 4- En 1797, la signature IETTON et LAUER apparaît à nouveau sur deux jetons qui portent des légendes allemandes (Hennin 819 et 820) et qui ressemblent aux jetons de 1796, non seulement par les matériaux utilisés, mais aussi par leurs dimensions atypiques (diamètre 33 mm, poids plus que 10 grammes). Ils portent d’ailleurs le même portrait du jeune général Bonaparte. Ces deux jetons commémorent la Paix de Campo Formio (16 octobre 1797) entre la France et l’Autriche, qui marqua la fin de la première campagne d’Italie (réf.2). La première variante (Hennin 819) ne montre que le portrait de Bonaparte (très semblable au jeton Hennin 768, tourné vers la droite, avec son habit ouvert). Le revers est différent et présente une stèle en forme de pyramide dont le sommet porte un trophée de piques et de drapeaux ; la stèle est gravée au centre : DEN/16/OCTOB/1797. De plus on retrouve deux soldats à cheval, décorés de trompettes et enregistrés FRI/DE. Il existe une deuxième variante (également signée IETTON et LAUER ; annotée Hennin 820) qui a le même revers que Hennin 819. Mais l’avers est différent PREMIER PORTRAIT MÉTALLIQUE DE NAPOLÉON RÉALISÉ PAR ERNST LUDWIG SIGMUND LAUER

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