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Bulletin Numismatique n°234 24 Les monnaies, dans l’Antiquité en particulier, indiquent rarement leur dénomination. Les plus anciennes sont souvent anépigraphes (sans légende). Pour la période archaïque (c. 650-480 a. C.), elles sont dotées d’un carré, dit creux ou composite, partitionné ou non. Nous ne savons pas exactement quand est née la Monnaie (nomisma = la loi). Il semble qu’elle fasse son apparition dans le royaume de Lydie dans la seconde moitié du VIIe siècle avant J.-C. Mais de petits lingots estampillés sont aujourd’hui recensés et constituent peut-être les prototypes de la monnaie elle-même au tout début de ce siècle. La naissance de la monnaie révolutionne les habitudes de troc et permet d’évaluer les objets à partir d’un étalon et d’en garantir la valeur. Ce changement s’accompagne d’une multiplication des échanges et de l’ouverture des marchés. Le fait que les premiers monnayages d’électrum (métal natif charrié par les fleuves d’Asie Mineure comme le Pactole) soient apparus en Asie Mineure occidentale n’est peut-être pas dû au hasard, mais à la volonté des possédants - royaume de Lydie ou cités grecques d’Asie Mineure - de créer un système de valeurs et des moyens d’échanges afin de les garantir. La monnaie c’est aussi la Loi et elle revêt un caractère sacré. La Lydie était située au carrefour de grands axes routiers et commerciaux, le bassin méditerranéen et l’Asie centrale. Elle a su tirer avantage de cet emplacement stratégique en mettant en place des taxes et des droits de douane. Disposant d’importantes ressources minières et métalliques grâce à l’électrum (alliage naturel au départ d’or et d’argent) dont le fleuve Pactole charriait les pépites et le mont Tmole qui en détenait des filons, la Lydie fut pour le monde grec « l’Eldorado » de l’Antiquité. Les rois de Lydie entretenaient de nombreux échanges commerciaux avec ce monde grec, notamment par l’intermédiaire des cités grecques des côtes. Puissance économique, la Lydie était aussi une puissance bancaire, puisque les Lydiens inventèrent l’usage de la monnaie. Les rois de Lydie participèrent aussi à la vie religieuse et sacrée des grands lieux de culte comme Éphèse ou Delphes. Aucune chronologie certaine ne peut être établie quant à l’apparition de la monnaie. C’est sous la dynastie des Mermnades entre Gygès (685-644 a. C.) Alyatte II (610-561 a. C.) et avant Crésus (651-546 a. C.) que la monnaie fit son apparition dans cette partie du monde. La richesse du royaume de Lydie est restée proverbiale. Le Pactole qui coulait à Sardes charriait des pépites d’or, ou plutôt d’électrum. Le Monnayage lydien, l’un des premiers du monde grec, débuterait au milieu du VIIe siècle avant J.-C. Nous avons d’abord un statère d’électrum natif, d’étalon milésiaque à 14,20 g. Notre série la XVI du classement de Weidauer comprend des trités (1/3 statère) et des demi-hectés (1/12 statère). Ce type présente toujours une tête de lion avec une verrue sur le front. Le choix de cet animal n’est peut-être pas anodin et il orne, au départ, de nombreux monnayages archaïques. Le carré creux bipartite est déjà un progrès par rapport au carré de même type, mais informe, sans division. Dans le trésor de Gordion (IGCH. 1176) trouvé à Gordion en Phrygie en 1963, il y avait 45 pièces d’électrum, 26 trités, 1 hecté et 18 douzième de statères. Le trésor pourrait avoir été enfoui vers 610 avant J.-C. Ces monnaies sont frappées pour l’actuelle Turquie en Ionie, Mysie et Lydie. Elles sont en premier lieu de petits lingots pondéraux dont la masse (poids) repose sur des étalons : lydien, ionien, milésien ou phoçaïque, donc tous différents, qui obligeaient les changeurs (trapèzistès, trapéza = table en grec ancien) à d’habiles manipulations afin de trouver le juste cours. Si aujourd’hui, nous évoquons la Tritè (tiers de statère), cette division ne se justifie que par rapport au statère, pièce pivot du système monétaire. Nous avons choisi pour l’illustrer, une des dénominations les plus anciennes frappées dans le royaume Lydien, ancêtre des créséides de Crésus (561-546 a. C.) et reprises ensuite par les conquérants Perses de Cambyse à Darius Ier avant l’introduction de la darique. Rare, le Trité ou la Tritè, est un témoignage tangible de la naissance de l’économie monétaire ! Marie BRILLANT et Laurent SCHMITT BIBLIOGRAPHIE • Sous la direction de Michel Amandry, Dictionnaire de Numismatique, Larousse, 2e édition, Paris, 2006. • Michel Galléazzi, Lexique des 2 700 mots de la Numismatique, Numismatique & Change, Révingy-sur-Ornain, 2005. • L’ensemble des données de Cgb.fr Li 18 : 58 € VOCABULAIRE : TRITÉ OU TRITÈ

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