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Bulletin Numismatique n°234 18 La date du décès d’Hélène fait débat : certains parlent de 328, le RIC retient 329, et d’autres tiennent pour le 18 août 330. Le lieu est aussi discuté : à Rome (sa résidence habituelle) ou à Nicomédie (entourée des siens). Son fils inaugura Constantinople le 11 mai 330 : nous pensons qu’il l’aura fait en compagnie de sa mère, et que celle-ci ne sera pas retournée à Rome avant sa mort. En effet, une rarissime folle - dont on ne connaît que deux exemplaires - fut émise pour elle à Constantinople, au droit anépigraphe et dont le revers présente Tyché assise sur un trône, tenant une corne d’abondance et un rameau, une proue de navire à ses pieds : cette représentation particulière de Tyché se voit aussi sur un médaillon constantinien d’inauguration de la ville, au droit anépigraphe également, réalisé dans le pur style des tétradrachmes du second siècle avant notre ère. Hélène, Constantinople, RIC - (ex-coll. Ramskold, vente Leu 26 lot 5440) Constantin I, médaillon, RIC 53 (vente Triton VIII lot 1249) Le choix de Tyché pour cette dédicace rituelle de la ville tombait sous le sens dans ce monde oriental romain. Dans le mythe de la fondation de Byzance, Byzas aurait consacré Rhéa comme Tyché de la ville, les combinant toutes deux en une seule déesse dénommée Tyché Poliade. De façon plus générale, elle était la divinité de la Fortune, de la Prospérité et de la Destinée d’une cité. Il est intéressant de noter que la Tyché représentée sur ces deux témoignages numismatiques constantiniens est une synthèse de la Tyché Poliade (corne d’abondance) et de la Tyché d’Alexandrie (épi de maïs dans une main et proue de navire au pied) : peut-être Constantin aura-t-il ainsi voulu signifier que Constantinople devenait la capitale de l’Empire d’Orient, dépassant son statut antérieur de métropole provinciale. Nous apprenons par le Chronicon Paschale, dont l’auteur du VIIe siècle puisa ses informations dans des sources antérieures (dont Eusèbe de Césarée), que Constantin aurait consacré la ville à Tyché au cours d’un sacrifice non sanglant et qu’il émit un décret stipulant que lors des célébrations marquant l’anniversaire des premiers jeux dans le nouvel hippodrome, une statue de bois qui le représentait tenant une statue de Tyché dans la main droite devrait y être amenée en grande pompe dans un chariot qui ferait un tour de piste et s’arrêterait devant la loge impériale, où l’empereur du moment devait se lever et lui rendre hommage. Cette rarissime folle pour Hélène fut certainement émise au même moment que les émissions exceptionnelles d’inauguration de la ville. Nous retenons donc l’hypothèse de la présence d’Hélène à Constantinople en mai 330 et de son décès trois mois après au palais impérial de Nicomédie, mais toute autre date ou lieu ne modifierait en rien le raisonnement qui suit. Constantin n’élèvera pas sa mère au rang de diva, en dépit des liens qui semblent l’avoir lié à elle. A-t-elle voulu s’inscrire en rupture avec cette tradition païenne romaine, considérant qu’une chrétienne ne peut prétendre à la déification ? La conséquence en est qu’aucune monnaie de consécration à son effigie ne semble avoir été émise. Il faudra attendre 337 pour qu’une monnaie de restitution PAX PVBLICA soit émise par ses petits-fils. SÉRIES « PORTE DE CAMP » PROVIDENTIAE ET VIRTVS AVGG : POURQUOI DEUX G ? En septembre 324, à la suite de sa défaite militaire contre Constantin, Licinius doit abandonner le pouvoir. Il perd son statut d’Auguste, son fils Licinius II perd son titre de césar, et tous deux sont envoyés comme simples particuliers à Thessalonique, où ils seront assassinés peu après. Demeurant seul Auguste pour la première fois depuis la tétrarchie, Constantin fait alors émettre de 324 à 330 dans tout l’empire le fameux type « porte de camp », que Licinius avait fait frapper dans le seul atelier d’Héraclée de 316 à 320, avec deux légendes : PROVIDENTIAE AVGG et VIRTVS AVGG. Pourquoi Constantin fait-il inscrire sur ces revers « AVGG » alors qu’il est l’unique Auguste de l’empire ? La seule explication plausible nous semble être qu’il y associe l’Augusta senior Hélène, dans la même période où il honore les deux Augusta par des émissions qui leur sont consacrées. On notera d’ailleurs un indice numismatique de la préséance d’Hélène sur Fausta par l’absence de bustes diadémés pour cette dernière (hormis quelques exemplaires à Thessalonique où le buste d’Hélène est associé à la titulature de Fausta). Les deux G demeurent présents au revers de 326 à 330, bien après le décès de Fausta. Il se peut toutefois qu’il ait associé les deux princesses sous un seul et même G qui aurait symbolisé un pluriel sans précision de nombre, de même que CAESS concernait ses trois fils. L’association Auguste / Augusta par « AVGG » dans une légende (en l’absence d’un second auguste) a des précédents sur des monnaies émises alors qu’un seul auguste « mâle » régnait : on la trouve sans surprise sur les CONCORDIA AVGG pour Julia Paula (RIC 216), Julia Mamaea (RIC 330), Orbiana (RIC 319 et 320), Tranquillina (RIC 249, 250, 252, 340a et b) et Severina (RIC 3, 16 et 17). De même pour les types CONCORDIA AVGG (RIC 119, 125) et PIETAS AVGG (RIC 120 à 122) d’Otacilia Severa émis de 244 à 246, avant l’élévation de son fils Philippe II au TRACE NUMISMATIQUE DE LA MORT D’HÉLÈNE (330 AP. J.-CH.)

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