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Bulletin Numismatique n°219 32 La numismatique est définitivement une science surprenante. Si elle est notre passion, son objet est un élément essentiel de l’archéologie et de l’histoire. Sur un chantier de fouilles, des fragments de poteries peuvent révéler une époque. Une monnaie, véritable capsule spatio-temporelle, mieux qu’un notaire, signera une année, et parfois même un mois et un jour…Cet incontournable objet d’étude porte en soi une immense quantité d’informations, de messages et peut inscrire en faux des vérités bien établies. J’ai trouvé très récemment un jeton, un token comme disent nos amis d’outre-Manche. Il s’agit d’une pièce produite par la compagnie Shell. Un de mes amis me disait : ce n’est pas le numismate ou l’archéologue qui trouve une monnaie, c’est la monnaie qui trouve l’homme. Voici donc un jeton promotionnel, une médaille publicitaire d’une grande compagnie pétrolière anglo-néerlandaise bien connue. Il semblerait qu’en 1969 la compagnie au coquillage proposait, peut-être en cadeau, à ses clients une médaille qui portait bien sûr son logo mais aussi les grands événements de l’histoire aérospatiale. Cette promotion a dû intéresser les collectionneurs, elle présentait des thèmes différents de l’épopée spatiale allant d’Icare à Apollo 13. Différentes éditions ont été produites dans le monde en aluminium, en laiton, en acier… pour le Danemark, l’Angleterre, l’Afrique du Sud, la France et d’autres pays encore peut-être ? Ainsi nous observons un jeton publicitaire de station-service datant de 1969, produit pour la France. Il a un diamètre de 26 mm et une masse de 5 grammes d’acier plaqué laiton. Son épaisseur est de 1,5 mm avec une tranche lisse. Au revers nous lisons SHELL au sein d’une coquille Saint-Jacques, l’emblème de SHELL. Au droit, un biplan survolant la mer, une inscription ALCOCK & BROWN-1919. Deux illustres inconnus, que la mémoire des siècles n’aura pas retenus et qui vont susciter toute ma curiosité. La grande numismatique ne porte pas seulement sur les monnaies d’or du roi Theodore du Bosphore. Des pièces apparemment insignifiantes peuvent amener leur lot d’intérêts et de surprises. Le 14 juin 1919, à 13h40, un bombardier Vickers Vimy IV équipé de deux moteurs Rolls-Royce de 350 chevaux chacun, avec 3 960 litres d’essence, décolle de Terre-Neuve au Canada. Il parcourt au dessus de l’Océan Atlantique 1890 miles soit 3041,66 km en 15h57 minutes à la vitesse moyenne de 220 km/h. Le 15 juin 1919 à 8h40, les aviateurs John Alcock dit « Jack » et Arthur Whitten Brown posent leur avion à Clifden dans le Connemara en Irlande. Les héros du moment reçoivent une récompense de 10 000 livres sterling des mains de Winston Churchill, la somme avait été promise par le Daily Mail. Quelques jours plus tard ils sont anoblis par le roi George V. Une statue est érigée à l’aéroport d’Heathrow à Londres depuis 1954 pour commémorer l’exploit. Un monument marque leur point d’atterrissage en Irlande et leur avion est exposé au Science Museum de Londres. Diantre, c’est Fachoda ! Nous sommes trahis ! Ceux de ma génération ont connu les « faucheurs de marguerites » et j’ai encore dans l’oreille la voix de Daniel Costelle dans sa série culte sur l’Histoire de l’Aviation (1978) qui commentait l’atterrissage du Spirit of Saint Louis sur l’aéroport du Bourget le 21 mai 1927 au terme d’un vol de 33 heures et 30 minutes… Charles Augustus Lindbergh était le premier ! Il est le premier à traverser l’Atlantique, il est le seul héro, comme Blériot avait été le premier à traverser la manche en 1909. La gloire ou la popularité de LINDBERGH est immense et le retentissement de son exploit, prétendu sans précédent, brille encore de nos jours. Personne n’aura parlé du premier vol entre New York et Madrid, entre New York et Rome ou Moscou ou Bruxelles, Liège ou Oulan-Bator. Tout le monde s’en fout. Très probablement ALCOCK & BROWN 1919 LE PREMIER VOL TRANSATLANTIQUE

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