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Bulletin Numismatique n°210 28 L a numismatique du long règne de Louis XIV (72 ans, 1643-1715) est très riche en monnaies béarnaises. Le domaine ou la principauté de Béarn, comprenant la Basse-Navarre portion de l’ancien royaume de Navarre, fut apporté à la France par Henri IV, seigneur de Béarn, portant le titre de roi de Navarre. De ce moment date la formule « roi de France et de Navarre » adoptée par Henri IV et ses succes- seurs les rois Louis, de la famille de Bourbon. Pour ces raisons historiques, les monnaies béarnaises conser- vèrent jusqu’à la Révolution une légende spéciale matérialisée par l’abréviation DB (Dominus Bearnie = Seigneur de Béarn) et l’emblème de la vache tenant lieu de différent d’atelier. À l’avènement de Louis XIV, trois ateliers existaient en Béarn : Pau et Morlaàs dans le Béarn proprement dit, Saint-Palais en Basse-Navarre. Morlaàs fut fermé définitivement en 1662, Saint-Palais en 1672 ; Pau subsista jusqu’à la Révolution, avec la légende DB. Toutes les monnaies béarnaises de Louis XIV sont rares, voire très rares sinon rarissimes. Dans sa vente de juin, Cgb. fr en propose un exceptionnel échantillon dont plusieurs exem- plaires de ma collection constituée depuis 1957 ; d’autres ventes suivront dans les mois qui viennent. Le catalogue des monnaies béarnaises de Louis XIV a été pu- blié en 2012 (1 re partie) et 2014 (2 e partie) dans la Revue Numismatique à partir des monnaies de ma collection. Je ne peux qu’y renvoyer les lecteurs du Bulletin Numismatique . Christian CHARLET LES MONNAIES BÉARNAISES DE LOUIS XIV Avec la France, l’évêque de Verdun entre en conflit dès 1624 lorsque Louis XIII et Richelieu, après le passage de Mansfeld et la mort du duc Henri, décident de renforcer le rôle straté- gique de Verdun en y construisant une citadelle. L’évêque François s’oppose à cette construction, proche de sa cathé- drale. Le conflit s’envenime jusqu’à ce qu’il excommunie les bâtisseurs de la citadelle au début de 1627. Devant la réaction de la France, François est obligé de s’enfuir et de se réfugier à Cologne jusqu’en 1629. Comme il combattra plus tard, à partir de 1633, aux côtés de Charles IV, son évêché de Verdun lui sera confisqué par la France et rendu seulement en 1648 par les traités de Westphalie pour le seul spirituel de l’évêché, le temporel n’existant plus du fait du rattachement définitif de l’évêché de France. Dans ce contexte, la frappe du florin à la Vierge, en 1624 ou 1625 5 et en tout état de cause avant 1627 puisque cette mon- naie figure dans le premier Tarif Verdussen , prend toute sa si- gnification. Elle est une marque d’opposition à la France au moment où celle-ci, par la construction de la citadelle de Verdun, réduit l’autonomie et les libertés de l’évêché de Verdun qui reste une terre d’Empire jusqu’en 1648. Elle re- joint la frappe du jeton des trois frères (cf. B.N . n°208) dont l’inspiration est la même, le jeton étant peut-être un peu plus tardif, vers 1627-1629. Mon hypothèse d’attribuer ce florin d’or non millésimé et en partie anonyme de Verdun à l’évêque François de Lorraine- Chaligny (1622-1661) est cohérente avec l’histoire de l’évê- ché de Verdun et son évolution au XVII e siècle, ainsi qu’avec la composition de la monnaie et les motifs et légendes qui la composent. Je propose donc de la classer désormais, comme le jeton des trois frères de Lorraine-Chaligny, à l’épiscopat de l’évêque François (1622-1661), en espérant qu’on la retrou- vera un jour ainsi que d’autres monnaies de ce dernier prélat autonome de Verdun avant le rattachement de cet évêché d’Empire à la France en 1648. 5 Remarquons qu’en 1624 le prince-évêque de Metz, Henri de Bourbon, duc de Verneuil, fils légitimé de Henri IV, se met à battre monnaie à Vic-sur- Seille (cf. CHARLET 2018, p.223-235). PS. Dans le n°208 du Bulletin Numismatique j’ai indiqué par erreur Henri de Lorraine-Chaligny, marquis de Mouy, comme plus jeune que François, le second évêque. En fait, il était un peu plus âgé selon d’autres sources historiques, les auteurs anciens n’étant pas toujours d’accord entre eux. Selon le grand Dictionnaire historique de Moreri (édition 1732), Charles serait né en 1592, Henri marquis de Mouy en 1596 et François, le second évêque de Verdun, en 1599 ; j’adhère à cette information. Christian CHARLET BIBLIOGRAPHIE CALMET 1740 : Dom Augustin CALMET, Dissertation sur les monnoyes, Nancy, 1740 CHARLET 2018 : Christian et Olivier CHARLET, Henri de Bourbon-Verneuil, fils légitimé de Henri IV et les dernières monnaies épiscopales de Metz, RT SENA n°9 , Colloque de Metz, Paris, 2018. CHARLET 2021 : Christian CHARLET, L’énigmatique je- ton verdunois des trois frères, princes de Lorraine-Chaligny, millésimé 1617, Bulletin Numismatique n°208, mai 2021, pp. 30-31 CHARLET, KIND 2016 : « Trois monnaies des princes- évêques de Verdun provenant de l’ancienne collection royale conservée à la BnF », BSFN 71/04, avril 2016, pp.125-128. FLON 2002 : Dominique FLON, Histoire monétaire de la Lorraine et des Trois-Evêchés , Nancy, 2002. LIENARD 1889 : Félix LIENARD, Monographie de la Nu- mismatique verdunoise, Verdun, 1889. ROBERT 1885 : Pierre-Charles ROBERT, Monnaies et jetons des évêques de Verdun, Mâcon 1885. VERDUSSEN 1627 : Carte ou Liste, chez Hierosme Verdus- sen, Anvers 1627. VERDUSSEN 1633 : Ordonnance et Instruction, chez Hie- rosme Versussen, Anvers 1633. UNE EXCEPTIONNELLE MONNAIE À RETROUVER

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