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Bulletin Numismatique n°204 42 Q uand la Banque de France conçut et mit en circulation à la fin du 19 e siècle les billets de la série dite BLEU ET ROSE (50, 100, 500 et 1000 F), elle pensait que ces billets étaient inimitables. Nous sommes au début de la photogra- phie et la fabrication d’un billet avec deux passages avec le Bleu et le Rose, par ailleurs peu « impressionnables » sur la pellicule photo, devait rendre ceux-ci infalsifiables. L’histoire suivante prouvera le contraire, et d’autres faussaires conti- nuèrent avec plus ou moins de bonheur. Celle-ci concerne un chimiste : M. SCHLUMBERGER. MONSIEUR SCHLUMBERGER ET LA BANQUE DE FRANCE C ’est un savant chimiste jouissant d’une grande notoriété puisqu’il est accrédité auprès de l’administration des Postes et Télégraphes. Les ennuis commencent pour lui lorsqu’il se rend au siège de la BDF et déclare : « Vous croyez qu’on ne peut pas falsifier vos billets ? Voici la preuve du contraire ». Il sort alors de sa poche un paquet de billets faux (NDLR : certainement des 50 F Type 1889 Bleu et Rose) disant que ces billets sont de sa fabrication et que la BDF peut les soumettre à ses experts en défiant de les distinguer des billets authentiques. Les experts, à première vue, les décla- rèrent excellents (authentiques ?). Il fallut une série de vérifi- cations pour s’apercevoir qu’ils étaient faux. Notre faussaire, pour la bonne cause, apportait aussi à la BDF la manipula- tion chimique à l’aide de laquelle on pouvait instantanément reconnaître un faux billet d’un vrai. La suite est moins glorieuse. Certes on trouva l’expérience très « jolie » et très ingénieuse, mais la loi est la loi. La BDF déposa plainte contre lui en fa- brication de faux billets. Ce crime était puni, à l’époque, des travaux forcés à perpétuité. Il eut d’ailleurs toutes les peines du monde à se sortir de cette justice qui, bien que reconnais- sant que sa probité et sa bonne foi étaient au-dessus de tout soupçon, ne se départit pas de cette devise : la loi est formelle. Cette version (Journal le PETIT HAVRE de 1892) peut être complétée par le procès-verbal de la séance du comité BDF des livres et portefeuilles du 19 janvier 1891 qui a une autre version antérieure strictement professionnelle et technique. Voici quelques passages édifiants : M. Schlumberger était venu nous voir pour exposer qu’il avait trouvé un moyen photographique de reproduire les dif- férents dessins de nos billets avec leurs couleurs et leurs teintes. NOTA : je pense que son procédé permettait de reconstituer les plaques couleur en séparant les superpositions. D’un billet terminé il pouvait reconstituer la plaque bleue et la plaque rose. M. Schlumberger était sur la voie de découvrir un procédé de fabrication de billets multicolores dont la reproduction pré- senterait de grandes difficultés. Il demanda une subvention qu’il obtint. La BDF, après avis de la commission spéciale d’études, s’occuperait des améliorations à introduire dans sa confection des billets. NOTA : est-ce ce procédé de « faussaire » qui nous donna les premiers billets en quadrichromie (1000 F et 5000 F Fla- meng et 100 F LOM) ? M. Schlumberger voulait peut-être aussi « rentabiliser » au maximum son invention en s’adres- sant au vice-consul d’Autriche pour communiquer ses procé- dés, mettant ainsi fin à sa collaboration avec la BDF. MONSIEUR SCHLUMBERGER ET LA BANQUE NATIONALE DE BELGIQUE N ullement échaudé par son aventure française, c’est vers la Banque Nationale de Belgique que notre inventeur- faussaire se tourne avec son procédé chimique pour recon- naître les faux billets des vrais. La BNB, tout en reconnaissant M. SCHLUMBERGER,LE FAUSSAIRE PRESQUE MALGRE LUI Reconstitution du Rose et Bleu Un des 3000 exemplaires de provenance belge non saisi par le parquet de Paris

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