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Bulletin Numismatique n°200 30 B ojarski, Cazale, Rocher, Versini, dès l'après-guerre les faussaires se sont déchaînés sur le 1 000 Francs Mi- nerve et Hercule. La Banque de France elle-même re- connaît que ce billet n'était pas suffisamment sécurisé : Engagée en 1940, la création de ce billet s’inscrit tout d’abord dans la mise au point de coupures sécurisées par l’ajout d’une impression délicate, fine et noire, donnant un relief visuel et tac- tile aux motifs principaux de la vignette du recto : la taille-douce. La guerre interrompt ce travail et ce n’est qu’en septembre 1944, après la libération de Paris, que l’on reprend sa préparation dans l’objectif de remplacer les coupures émises pendant la guerre par la Banque de France et par les Alliés après le débarquement de Normandie (6 juin 1944). Mais la pénurie des ressources indus- trielles (main d’œuvre, matières premières, énergies, transports…) contraint à abandonner l’impression en taille-douce et à allonger les plannings de production. Ainsi le billet ne sera pas prêt pour le remplacement de toutes les coupures début juin 1945 ; il ne sera émis que le 2 juillet et sans grande protection anti-contrefa- çon. Sa vulnérabilité sera exploitée par les ateliers d’impression clandestins qui s’étaient fortement développés durant l’Occupa- tion allemande, puis par des faux monnayeurs expérimentés et bien équipés, dont Ceslaw Bojarski plus connu depuis pour ses contrefaçons du billet de 100 nouveaux francs « Bonaparte » ré- férence : https://www.banque-france.fr/sites/default/files/ e_1000fbdf1945_minerve_hercule.pdf Les faux Minerve et Hercule sont nombreux mais mal connus. Nous en considérerons trois catégories distinctes : ceux de grande qualité, affaire de Saint-Tropez (sur papier authen- tique) et Bojarski, ceux de Rocher et Versini car l'affaire est très importante et les ramifications nombreuses, et tous les autres, plus ou moins bien réussis. L'AFFAIRE DE SAINT-TROPEZ (AFFAIRE CAZALE OU CASALE) S ur son site, Christian Porcheron indique : « Employé aux papeteries de Rives (Isère) Roger Douin préposé à la garde des stocks du papier filigrané fabriqué spécialement pour la Banque de France se laissa entraîner par le repris de justice François Campana et en 4 mois il détourna 60 kilos de papier filigrané qu’il remit à Alexandre Doin (presque son homonyme et proprié- taire d’un bar louche de Toulon), et Charles Biaggini dit : « Cha- lou ». Campana agissait pour le compte du gangster Ange Sali- cetti (propriétaire du restaurant « la rascasse ») et le fameux Lucien Scola, chef du gang des tractions avant du midi. Le gang aurait imprimé 40 à 50 millions de faux billets de 1000 F. » référence : https://www.fausse-monnaie.com/les-faux-billets/ faux-billets-du-20eme-siecle/ Voir aussi l'article des archives du Monde de 1950 : « La brigade financière de Paris qui, avec la sûreté de Toulon, enquête sur l'affaire d'émission de faux billets de banque de 1 000 francs vus récemment en circulation sur la Côte d'Azur, et qui avait déjà arrêté Edouard Jougon, caissier de la Société mar- seillaise de crédit, et Paul Capuro, marin pêcheur à Saint-Tro- pez, vient de procéder à quatre nouvelles arrestations : Jules Ca- sale, cinquante ans, né à Toulon, repris de justice, condamné à vingt ans de travaux forcés pour intelligence avec l'ennemi, pro- priétaire de l'hôtel de Paris, à Draguignan, gracié depuis peu ; son amie, Aline Van Dendale, vingt-deux ans, se disant infir- mière et demeurant à Lille ; Louis Blanc, commerçant à Cuers (Var), propriétaire du café du Commerce, et enfin sa belle-sœur, Thérèse Aliani, née en janvier 1914 à Toulon, épouse d'Auguste Blanc, qui est actuellement recherché. Jules Casale, l'instigateur du trafic, avait, par l'intermédiaire de Paul Capuro, acheté moyennant 40 000 francs la complicité d'Edouard Jougon, le caissier de la banque, Aline Van Dendale, l'amie de Casale, se fit alors ouvrir un compte à la succursale de la Société marseillaise de crédit à Saint-Tropez en versant 500 000 francs en faux bil- lets. Puis peu après elle retira la somme en trois fois au siège de la banque Marseille. Ces retraits précipités éveillèrent les soupçons du gérant de la banque… » Devenir faussaire à cette échelle requiert un groupe de per- sonnes important et un cloisonnement des savoirs. Trouver du papier, réaliser une gravure, imprimer, écouler les billets, chaque étape doit être gérée de façon autonome de sorte que si l'un des maillons cède il n'emporte pas l'ensemble de la chaîne. Durant la guerre, Bojarski employa ses talents à réali- ser des faux papiers, en lien avec cette équipe. Il est plus que probable qu'il réalisa tout ou partie des gravures du Minerve et Hercule. Nous sommes en présence d'un faux exceptionnel et redou- table, une impression « vulnérable » de la Banque de France et du papier authentique pour les faussaires. Si l'on ajoute à cela l'intervention plus que probable d'un certain… Bojarski, on obtient un cas unique et des faux historiques. LES FAUX MINERVE ET HERCULE

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