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Bulletin Numismatique n°197 24 C omment se fait-il que pour la valeur faciale de 5 francs, avec plus de 21 millions de pièces frappées au type Union et Force, plus de 160 millions à l’effi- gie de Napoléon I er et plus de 120 millions pour Louis XVIII, les exemplaires de très belle qualité soient si rares ? L’explica- tion est qu’en fait il y eut au cours du XIX e siècle pour les pièces françaises, deux grosses refontes de monnaies en argent et cela pour deux raisons différentes : • Les monnaies en argent des rois Louis, ainsi que celles frappées lors de la Révolution, sous Napoléon I er , Louis XVIII et Charles X, avaient une très faible teneur en or, de l’ordre de 0,1 %. Les méthodes d’affinage ayant été améliorées, il y eut aux alentours de 1830 une refonte massive principalement par des affineurs privés de monnaies en argent, des écus, de- mi-écus, 5 francs, 2 francs… afin de récupérer l’or contenu dans les pièces. Bien évidemment, pour que cela soit rentable, il fallait fondre de grandes quantités de pièces et malheureu- sement, cette information fait défaut, mais il est fort probable que des dizaines de millions de monnaies aient ainsi fini à la fonte. • Les découvertes d’importants gisements d’or en Califor- nie et en Australie vers 1850 entrainent une offre considé- rable d’or sur les marchés, qui fait automatiquement augmen- ter le prix de l’argent (la quantité d’argent disponible n’ayant pas augmenté). En France, le rapport or/argent utilisé reste inchangé alors qu’il aurait dûdiminuer. En conséquence, le prix du métal argent contenu dans une pièce de 5 francs est supérieur à 5 francs. Le résultat ne se fait pas attendre avec d’une part la disparition des monnaies de 5 francs, 2 francs et autres qui sont exportées pour la refonte et d’autre part la frappe très faible des nouvelles monnaies de 5 francs. Selon les estimations, plusieurs centaines de millions de pièces d’argent furent exportées et fondues entre 1850 et 1860. Par contre, une faible quantité de pièces atteignirent les ateliers de frappe en France. Étant donné la pénurie d’argent, le gou- vernement préféra alors frapper des monnaies en or de 5 francs et 10 francs à la tête laurée à partir de 1862, ce qui était aussi bien plus rentable économiquement. Si l’on consulte les catalogues, on peut voir que les quanti- tés frappées de 5 francs à l’effigie de Napoléon III au type à la tête nue diminuent dramatiquement à partir de 1856, pas- sant de 9 millions pour l’année 1856 à 72 614 en 1857, puis 26 734 l’année suivante et 3 357 en 1859. La monnaie de 2 francs subit un sort similaire avec 1 280 monnaies frappées en 1858 et 886 en 1859. À partir d’informations que je viens d’avoir grâce au site Nu- mista, j’ai pu me procurer l’article « Les refontes spéculatives de monnaies au XIX e siècle » d’Henri Petit et on y trouve des informations très intéressantes dont j’extrais les textes sui- vants : • Un seul affineur de Paris a dans l’année 1828 fondu en lingots près de 60 millions de matières et espèces d’argent. • La valeur nominale des espèces duodécimales d’argent remises aux Hôtels des monnaies du 1 er janvier 1830 au 31 décembre 1834 s’élève à 410 816 626 francs et qu’il fut versé aux changes, pendant cette même période des lingots dits « d’affinage » d’une valeur de 244 931 957 francs ; ces lingots provenaient de pièces duodécimales, de piastres, de pièces de 5 francs du premier Empire et de la Restauration fondues et affinées par l’industrie privée. Sachant que l’affinage avait commencé avant 1828 et s’est poursuivi bien après 1834, il est impossible d’établir une esti- mation cohérente car il n’y a aucune information complète à ce sujet, mais on peut affirmer d’ores et déjà que les quantités de monnaies refondues ont été très importantes. Il n’est pas illogique de penser que plusieurs centaines de millions de pièces d’argent (et d’or) ont fini au creuset. De nos jours, on peut cependant déduire des choses intéres- santes à partir d’informations qui sont à la disposition de tous les collectionneurs. Actuellement, d’une part les catalogues de cotation le Franc et le Gadoury donnent les frappes correspondantes à tous les ate- liers pour les différentes valeurs, types, ateliers et, d’autre part, les maisons de grading mettent à disposition des collection- neurs la base de données de toutes les monnaies gradées. En regroupant ces deux informations, on arrive en effet à des ré- sultats qui confirment qu’à une certaine époque, de grandes quantités de pièces ont été retirées de la circulation. Afin de réaliser cette étude, nous avons considéré uniquement les monnaies de 5 francs par type lors de leur apparition sous la Révolution, jusqu’à la dernière frappe de cette valeur au XIX e siècle en 1889. Nous avons pris en compte uniquement les monnaies gradées SUP et plus, c’est-à-dire : SUP = AU58-MS62 SPL = MS63 – MS64 FDC = M65 et plus. INCIDENCE DES GRANDES REFONTES DE MONNAIES EN ARGENT DU XIX E SIÈCLE SUR LES STOCKS ACTUELS

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