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Bulletin Numismatique n°229 41 LES 3 GLORIEUSES À NANTES, LES MÉDAILLES ANNIVERSAIRES DE 1831 ET 1832 ENTRE COMMÉMORATION ET PROPAGANDE POLITIQUE - PARTIE 1 prend un peu plus : il y a d’abord un défilé militaire, en Prairie de Mauves, auquel la cérémonie de remises des décorations succède, avant un défilé dans les rues de Nantes, qui passe en différents endroits emblématiques de la cité, notamment la place Louis XVI, le cimetière de la Miséricorde pour s’achever Place Royale. Commencée à 9 heures du matin, cette partie très protocolaire s’achève à 3 heures de l’aprèsmidi. Un banquet, sur le cours Henri IV, prend la suite à 4 heures. 44 tables, de cent couverts chacune, sont dressées. 4 400 personnes, prennent donc place, sur invitation. C’est à ce moment précis que la médaille commémorative trouve sa place. On peut ainsi lire dans l’article : « toutes les tables sont en un moment garnies de plus de 4 000 convives. La plus vive allégresse, l’enthousiasme règnent à chaque table. Bientôt les commissaires échangent les cartes du banquet contre une médaille qu’ils ont eu l’heureuse idée de faire frapper pour perpétuer la cérémonie de cette nouvelle fédération bretonne : elle est en bronze, du module de 33 millimètres ; d’un côté deux mains se joignent entourées de branches de chêne et d’olivier8 : la couronne de France les surmonte, on y lit cette devise: Patrie, Liberté, Union et force ; sur le revers on lit ces mots : Nantes Fête Nationale 1831 ; et pour légende : Anniversaire du 30 Juillet ». Figure 1: Colonne commémorative dans le cimetière Miséricorde, à Nantes. Une croix de Juillet entoure le nom de chacun des 10 morts « pour la Patrie ». Le monument est achevé en 1833, tout en étant vertement critiqué pour son esthétique par trop classique et pataude. Par ailleurs, la qualité est rapidement mise en question car son état se dégrade -trop- rapidement. Photo personnelle 8 Le journaliste commet peut-être une erreur d’interprétation, le motif nous paraît plutôt être du laurier, et non de l’olivier. Cette essence a sans doute plus de sens que l’olivier dans la circonstance, mais cela reste ouvert au questionnement. Plaque offerte par des ouvriers et travailleurs anglais, embauchés dans l’usine d’Indret, et qui ont assisté à ces journées révolutionnaires (laboureurs étant probablement une traduction erronée, typique d’un «faux ami», une catégorie redoutable tant pour les Français que les Anglais). Elle est fixée sur la colonne Louis XVI, à proximité de l’Hôtel d’Aux, où la fusillade a eu lieu. Photo personnelle LA MÉDAILLE COMMÉMORATIVE DE 1831 : UNE DEVISE RÉVOLUTIONNAIRE Grâce à cet article, nous disposons d’un certain nombre d’informations qu’il n’est pas si fréquent de connaître à propos d’une médaille de cette époque : nous avons une idée relativement précise quant au nombre de médailles frappées, qui doit être au moins égal au nombre de convives du banquet – 4 400, auquel il faut probablement ajouter un certain nombre d’exemplaires réservés à des fins protocolaires à d’autres destinataires. Au total, il est raisonnable de penser qu’environ 4 500 frappes ont été produites. Par ailleurs, nous savons qu’elle constitue quasiment un jeton de présence au banquet du 30 juillet, puisqu’elle était échangée contre un carton d’invitation. Des articles parus en juillet, nous apprennent que des souscriptions étaient ouvertes pour postuler à ce banquet -on pouvait donc y accéder de manière payante. Par ailleurs, certaines places étaient réservées à des membres désignés de certaines corporations : c’est notamment le cas chez les ouvriers. Sur le plan allégorique, plusieurs points méritent d’être soulignés. Le premier réside dans la composition, à l’avers du module, ancrée à la fois dans les racines de la Révolution de 1789 et dans les 3 Glorieuses. Il est intéressant de s’arrêter sur les éléments de la légende – l’examen du centre de la médaille viendra dans un second temps. Deux termes y sont inscrits : Liberté, Patrie. Ils ont une résonance très puissante, et symbolisent tout particulièrement les motivations des révolutionnaires de Juillet. Ces 2 mots figurent également sur les deux décorations officielles9, 9 Le programme en est fixé par 2 ordonnances royales, du 30 avril et 13 mai 1831. Pour la Croix de juillet, il s’agit de l’ordonnance du 30 avril : « Art. 2. — La croix de juillet consistera en une étoile à trois branches en émail blanc, montée sur argent, et surmontée d’une couronne murale en argent. Le centre de l’étoile, divisé en trois auréoles émaillées aux couleurs nationales, entouré d’une couronne de chêne, portera à la face, 27, 28, 29 Juillet 1830 ; et pour légende, Donné par le Roi des Français. Le revers, divisé comme le centre de la face, portera le coq gaulois en or, avec cette légende : Patrie et Liberté. Art. 3. — La croix de Juillet sera suspendue à un ruban moiré de couleur bleu d’azur de trente-sept millimètres de largeur, portant un liseré rouge de deux millimètres, placé de chaque côté du ruban à deux millimètres de son bord, conformément au modèle annexé à la présente ordonnance. Pour la médaille : Art. 1er. — La médaille instituée par la loi du 13 décembre 1830, à décerner aux citoyens qui se sont distingués dans les glorieuses journées de juillet, représentera le coq gaulois entouré d’une couronne de chêne,

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